Ardennes, envoyée spéciale
L’exercice de communication est impossible. François Fillon s’accroche : il continue à labourer le terrain, essaie de dérouler son programme. Jeudi, il a effectué son premier déplacement depuis le début de l’affaire. La semaine prochaine, il promet d’aller dans des bastions de droite, à Troyes, la ville du sénateur François Baroin, puis à Poitiers, fief de l’ex-Premier ministre Jean-Pierre Raffarin. Et même à La Réunion du 10 au 13 février. Sur la lancée de son grand meeting parisien dimanche dernier, il veut croire qu’en multipliant les réunions publiques, comme celle de Charleville-Mézières, il pourra surmonter le cataclysme. Combien de temps François Fillon pourra-t-il « tenir ferme » ? Le candidat s’est approprié l’expression couleur locale, soufflée jeudi soir par un élu des Ardennes, lors de son meeting à Charleville-Mézières. Et en effet, sa stratégie ne tient plus que dans ces deux mots. En sursis depuis le début de l’affaire, il tente de continuer à faire campagne comme si de rien n’était. « Aidez-moi à résister », a-t-il demandé jeudi soir à un petit millier de personnes venues l’écouter. Mais c’est au son de « pourri, pourri », lancé par un homme conduit manu militari vers la sortie, que son meeting a commencé.
Programmée de longue date (avant l’affaire), la virée dans les Ardennes, sur le thème de la fracture territoriale, a été maintenue, coûte que coûte, malgré des nouvelles révélations du Canard enchaîné la veille. Annuler serait comme arrêter de faire campagne. Déposer les armes. Une visite de commerces dans le bourg d’Attigny, prévue initialement, a toutefois été supprimée. La première étape du voyage, à Poix-Terron, se déroule dans une crèche, plus facile à encadrer. Ce qui n’empêche pas les débordements. Accueilli par un « Fillon, démission ! », le candidat est harangué par un homme à la sortie : « 800 000 euros pour que Penelope aille acheter du pain, enfoiré ! » Il est plaqué par le service d’ordre. Les images passent en boucle sur les chaînes d’information continue et les réseaux sociaux. Le ton de la journée est donné. Dans l’équipe de com du candidat, on relativise les difficultés, pour la forme : « J’ai connu pire avec Nicolas Sarkozy, il y avait souvent un mec d’extrême gauche qui traînait… », assure Dimitri Lucas, chargé de l’organisation de la couverture presse des déplacements. Il fait bonne figure et, comme à son habitude, place les journalistes, tente de soigner le décor.