Les lecteurs des « Jours » commencent à bien connaître le docteur Yannick Gottwalles. Le chef du pôle des urgences de Colmar, avec un de ses confrères de Mulhouse, lançait l’alerte il y a deux semaines déjà, avant que la France ne se retrouve confinée, sur la situation catastrophique dans l’Est de la France, aux avant-postes de la crise du Covid-19 (lire l’épisode 5, « Macron : la guerre des retranchés »). Puis, aux « Jours », il expliquait qu’il redoutait, face à la saturation, de devoir faire un choix entre les patients (lire l’épisode 6, « “On va faire une médecine de guerre” »). Enfin, dans un nouvel entretien aux « Jours », il prévenait que la situation dans le Grand Est allait être celle de toute la France (lire l’épisode 12, « “Il arrive, vous l’aurez, préparez-vous” »).
Mercredi, Emmanuel Macron était dans l’Est, à Mulhouse, et dans un discours martial, le président de la République faisait un certain nombre de promesses : « Un plan massif d’investissement et de revalorisation de l’ensemble des carrières » pour l’hôpital à l’issue de la crise, la majoration des « heures supplémentaires effectuées sous forme d’une prime exceptionnelle » pour les soignants. Enfin, le Président a juré craché que « cette réponse sera profonde et dans la durée ». Nous avons demandé à Yannick Gottwalles s’il était convaincu par ces annonces. Spoiler : non.
«On n’est plus en période électorale donc les promesses n’engagent que ceux qui les font. Moi, j’attends la véracité sur le terrain. J’attends la véracité par rapport à un salaire d’infirmier dont l’indice est bloqué depuis plus de dix ans, dont le profil de carrière, s’il continue tel qu’il est actuellement, ne sera au Smic que dans deux ans. Donc j’attends les faits, j’attends le dimensionnement de ce qui est annoncé.
Il y a eu un débat immense en France concernant la prime pour le personnel d’urgences annoncée en 2019 par Agnès Buzyn : quand on voit que cette prime fantastique est de 100 euros brut par mois au prorata du temps de travail, je pense qu’on se moque un peu de tout le monde ! Donc j’attends d’avoir la concrétisation de ces annonces et de voir comment mon personnel hospitalier va être revalorisé au niveau des urgences, comment mes étudiants en médecine vont être revalorisés au niveau de leur carrière, comment les autres personnels de santé et professionnel au sein de l’établissement vont être revalorisés. J’attends de voir et j’espère très sincèrement ne pas être, comme d’habitude, déçu.
Ce qui est dommage en France, c’est qu’il y a des prises de conscience et des annonces quand la catastrophe est là, alors que cette catastrophe était annoncée.