Ce dimanche 27 mars, il est 15 h 53 lorsque Yannick dégaine son téléphone pour filmer. Il se trouve sur l’esplanade du Trocadéro, à Paris, où se sont réunis des milliers de partisans d’Éric Zemmour pour son ultime meeting de campagne. Arrivé là au détour d’une balade, le trentenaire remarque le service de sécurité du parti Reconquête qui, raconte-t-il aux Jours, « zieute » étrangement un jeune homme noir. Ce dernier, comme Yannick, n’est pas dans l’enceinte même du rassemblement
Sur les images de Yannick, quatre hommes accostent le garçon puis le fouillent au corps de façon très professionnelle mais, a priori, sans motif légal. Autour du cou, ils portent tous le badge officiel du service d’ordre de Reconquête siglé « Sécurité Trocadéro ». À quelques mètres, derrière les barrières marquant la véritable enceinte du meeting, deux autres agents regardent la scène. Dans leurs mains, des brassards de couleur vive difficiles à distinguer sur la vidéo. On voit bien mieux celui que sort brièvement l’un des cerbères au premier plan : il est orange et estampillé « Police ». Il semble hésiter, cache son badge sécurité sous son T-shirt, sort son brassard, puis le range, le laisse dépasser de sa poche. « Il n’a pas d’invitation », concluent-ils. Ils décident alors d’exfiltrer le jeune homme pour le remettre aux gendarmes mobiles déployés à proximité et qui, d’après Yannick, l’embarqueront dans un camion. Il est 15 h 57. Rappelons qu’il se trouvait dans la rue et n’avait donc besoin d’aucune autorisation ou invitation pour y être.
Yannick a posté la scène sur les réseaux, largement relayée depuis. Le trentenaire, noir lui aussi, l’assure aux Jours, il est persuadé qu’ils ont contrôlé le jeune homme à cause de sa couleur de peau. « C’était une ambiance très pesante, souffle-t-il. J’allais moi-même partir au moment où j’ai vu la scène. Ce jeune n’avait rien fait, il était juste là et noir. » Outre ce racisme, aussi manifeste que tristement banal dans les meetings du candidat d’extrême droite, cette scène pose une autre question : que font des policiers dans le service d’ordre, privé, de Reconquête ? Contactée à propos de cette scène par Les Jours, la préfecture de police de Paris n’a pas répondu.