«Prenez le temps d’être audacieux ! Imaginez des choses qui n’ont pas été faites. On n’est ni à Bercy ni au Parlement. On est dans un lieu où l’exercice sera d’échanger entre acteurs qui n’ont pas l’habitude. On ne se juge pas. C’est une dynamique qui se veut inclusive et optimiste. » Micro à la main et ordinateur portable posé sur un pupitre devant elle, Alice Zagury, la dirigeante de The Family, a pris sa voix de vendeuse new age qui fait l’article. Ce samedi matin-là, la tâche de la patronne de l’accélérateur de start-up est périlleuse : mettre dans de bonnes dispositions la soixantaine d’investisseurs, d’entrepreneurs et de régulateurs du secteur financier venus au siège de son entreprise afin de prendre part à un « bootcamp » – comprendre : un atelier participatif –, exercice prisé dans le monde du numérique. La plupart ne connaissent pas le dispositif, mais ils sont venus pour la bonne cause : contribuer à un projet de loi pour les entreprises, le futur plan d’action pour la croissance et la transformation (le « Pacte », selon l’acronyme choisi). Alice Zagury est chargée, avec le député Modem Jean-Noël Barrot, de conduire des consultations sur le sujet spécifique du financement des entreprises, dont les conclusions doivent être officiellement présentées ce jeudi 21 décembre au ministre de l’Économie, Bruno Le Maire. Le sujet est suivi de très près par le gouvernement. Toute juste nommée à Bercy, la secrétaire d’État Delphine Gény-Stéphann a discrètement fait le déplacement – ce rendez-vous n’était pas annoncé dans son agenda.
Quand nous avons eu l’autorisation de nous glisser dans cette réunion, normalement fermée aux journalistes, nous avons sauté sur l’occasion (même s’il a fallu, comme les participants, se lever tôt un samedi). Nous voulions voir si les oppositions internes à la Macronie que nous avions découvertes précédemment (lire l’épisode 5, « Le député et la start-uppeuse font la tournée des patrons ») – pour résumer, l’establishment financier, hostile aux start-up –, allaient s’exprimer. Nous étions aussi assez sceptiques quant à la possibilité de mettre en œuvre un processus de consultation « horizontal » revendiqué par En marche, qui se révèle bien souvent être de la simple communication. Exemple, lors de la journée de présentation du « Pacte », le 23 octobre dernier à Bercy. Pour montrer qu’il était dans le coup du numérique, le gouvernement avait opté pour un dispositif scénique se voulant