Alors que l’élection présidentielle se rapproche, les analystes politiques, qu’ils soient journalistes, éditorialistes, militants ou candidats, ont enfin leur shoot quotidien. S’ils devaient se contenter d’un sondage tous les trois jours en moyenne avant les fêtes de fin d’année, ils peuvent désormais se ruer sur les « rollings ». Depuis janvier, chaque jour ouvrable, sont publiées en ligne deux de ces études quotidiennes qui guettent les fluctuations dans les intentions de vote des différents candidats. Ce qui fait plus de quarante sondages glissants publiés en un mois, auxquels s’ajoutent une vingtaine d’enquêtes traditionnelles, tous instituts confondus…
Le rolling, c’est comme un film, expliquent les sondeurs, par opposition au sondage traditionnel, « photographie de l’opinion à un instant donné » selon la formule consacrée. Pour réaliser un rolling, 500 personnes différentes sont interrogées chaque jour. Les intentions de vote sont calculées en cumulant les réponses des trois derniers jours, ce qui fait environ 1 500 personnes, si vous suivez bien. Deux rollings cohabitent dans cette campagne électorale. Le premier, lancé le 3 janvier, est porté par OpinionWay et financé par le cabinet Kea & Partners. Les résultats sont publiés chaque midi par Les Échos et Radio Classique. Le second est mitonné par l’Ifop depuis le 10 janvier, grâce au soutien financier de Fiducial, prestataire de services comptables, et de Paris Match et LCI, qui diffusent les résultats en fin de journée. Sud Radio, propriété de Fiducial, est également partenaire.
En posant la question chaque jour, on lisse les intentions de vote et on évite l’événement qui pourrait fausser les résultats ou introduire un biais.
« L’intérêt d’un rolling est d’éviter les variations épiphénoménales, dues à l’actualité par exemple, pouvant avoir un impact sur un sondage ponctuel », plaide Frédéric Micheau, directeur général adjoint d’OpinionWay, interrogé par Les Jours. « En posant la question chaque jour, on lisse les intentions de vote et on évite l’événement qui pourrait fausser les résultats ou introduire un biais », renchérit Frédéric Dabi, directeur général du département opinion de l’Ifop. Les deux soulignent la qualité de ces enquêtes, qui reposent sur des échantillons « suffisamment robustes statistiquement » et sont complémentaires des autres sondages. Les rollings comportent en tout cas les mêmes biais que les enquêtes traditionnelles (lire l’épisode 5, « Sondages, les biais dans le tapis ») : redressement, enquêtes menées sur internet contre gratification…
Les sondages glissants, ou tracking polls, ont été développés aux États-Unis à la fin des années 1960, raconte Frédéric Micheau, d’OpinionWay, dans son livre La Prophétie électorale.