
Labelle, Noir Anima (Infiné, 2023)
Il y avait jusqu’à récemment un festival électronique en plein milieu du cirque de Mafate, à La Réunion. Pour y arriver, il fallait descendre à pied et marcher trois heures et demie depuis le col des Bœufs, ou remonter la rivière des Galets en 4x4 avant de finir à pied, destination Aurère. Jérémy Labelle a souvent fait le chemin avec son matériel sur le dos
C’est là, dans la nature puissante du cœur de son île, que la musique de Labelle trouve son sens depuis ses débuts en 2013. On a déjà raconté il y a trois ans (lire l’épisode 67 de la saison 1, « Barbara Carlotti et Labelle, trésors des îles ») comment le jeune musicien, parti vivre et étudier la musique à haut niveau en métropole, est revenu à La Réunion pour y explorer un terrain presque vierge : la rencontre du maloya, le blues local des descendants des esclaves, et la techno de Detroit. Deux musiques du peuple, deux musiques de transe sans début ni fin, qui se sont rencontrées avant Labelle
Dans Noir Anima, son sixième long format en dix ans de carrière discographique, Labelle reprend son chemin électronique là où Univers-île s’arrêtait. Ce disque-là était une célébration des ondes et des divinités de La Réunion, bout du monde multiculturel que l’album arpentait au pas du marcheur pour en faire ressentir le moindre relief, la moindre texture de feuille. C’était un magnifique portrait géographique mis en musique, quand Noir Anima est d’office une affaire plus intérieure.