Depuis plusieurs semaines, des policiers en poste dans l’Essonne et des sources proches du dossier laissaient entendre qu’un coup de filet de grande ampleur, directement liée à l’agression de quatre agents au cocktail molotov à Viry-Châtillon, le 8 octobre, attendait le top départ. L’émotion suscitée par l’attaque avait déclenché un mouvement inédit de manifestations nocturnes réunissant des centaines de policiers. Le ministre de la Justice Jean-Jacques Urvoas avait promis des sanctions sévères contre ceux qui ont voulu « porter atteinte à la vie des policiers ». « Même nous on va être surpris du nombre » de personnes impliquées et de leur « pedigree », promettait en décembre un policier de la sécurité publique. Celui-ci soulignait la complexité de l’enquête, qui s’attachait à « prouver le rôle de chacun » dans « une filière, un vrai gros truc ». Ce mardi, trois mois après les faits, onze personnes âgées de 17 à 19 ans – dont quatre mineures au moment des faits – ont été arrêtées par la sûreté départementale de l’Essonne à la Grande Borne, à Étampes et en Seine-et-Marne.
Le jour de l’agression, deux voitures de police stationnées à quelques mètres l’une de l’autre gardaient le carrefour du Fournil et une caméra de surveillance qui y avait été installée. Cet endroit, à cheval sur les communes de Grigny et de Viry-Châtillon, connaît en effet depuis plusieurs années une forme très particulière de délinquance appelée « carambouille », dont les vols à la portière ne représentent que la partie émergée. De nombreuses plaintes ont été déposées par des automobilistes – surtout des femmes – qui, en s’arrêtant au feu rouge sur cette route départementale, se sont fait voler leur sac à main à l’intérieur de leur voiture, parfois en subissant des violences au passage. En décembre 2013, onze personnes avaient été interpellées dans une enquête liée à ces vols. La police nationale décrivait alors, dans un communiqué, le mécanisme d’une arnaque élaborée : « Les malfrats usent de violence pour dérober les sacs à main des automobilistes, puis utilisent ensuite les documents dérobés afin d’ouvrir de nombreux comptes bancaires, et à l’aide de fausses quittances EDF ou de fausses fiches de salaire, commettent de nombreuses escroqueries au préjudice d’organismes de crédit. »
Le scénario, tout en variant légèrement au fil des années, a déjà donné lieu depuis 2013 à plusieurs enquêtes et leur lot d’arrestations.