Il peste contre les nouveaux tags apparus sur les murs (« Casse un Starbucks », « Libération animale »…), se roule une cigarette et s’installe près des tables placées dans les allées de la fac. Il est chez lui, tout lui est familier. Barth balaie la foule de son regard vert d’eau. Il y a beaucoup de monde à Nanterre, c’est la rentrée universitaire, les étudiants se rendent d’un bâtiment à l’autre ou s’attardent sur les pelouses du campus, profitant du soleil. Avant l’été, la fac était déserte. Occupée pendant plusieurs semaines à partir du mois d’avril (lire l’épisode 26, « Occupy Nanterre ), elle a ensuite été fermée et désertée. Ces jours-ci, Nanterre bat son plein. Plus de 6 100 novices débarquent en première année. Les amphis où se tenaient de brûlantes assemblées générales sont retournés à la normale et abritent des cours magistraux dédiés à la « macroéconomie » ou aux « droits de l’homme et libertés fondamentales ». Tout semble rentré dans l’ordre. À la cafétéria, à peu près vide ce matin, on voit les formules éternelles à 5 ou 6 euros (sandwich + eau + pâtisserie), la routine. À l’entrée, une petite affichette interpelle les passants : « Tout le monde devrait avoir le droit de faire des études » et « Une seule solution : la mobilisation ». Elle date de début septembre et contribue à me donner une sensation de déjà-vu, de perpétuel recommencement.
Barth, inscrit en histoire, est l’un des militants Unef les plus actifs de Nanterre. « Ça va, sourit-il. Tranquille comme une année qui reprend. » Je l’avais rencontré pour la première fois il y a plus d’un an. Au même endroit. Il accueillait les « sans-fac » déboutés de la plateforme APB. Il remplissait des dossiers d’inscription, tenait des permanences (lire l’épisode 1, « Passe ta fac d’abord »). Un an plus tard, je revois les mêmes scènes. Parcoursup, dont les résultats définitifs seront connus après le 21 septembre, a remplacé APB. Des étudiants continuent pourtant, le ventre noué, à venir exposer leur cas, espérant décrocher une place sur les bancs de la fac, dans la filière de leur choix. Fin août, 3 800 candidats ayant émis un vœu pour Nanterre étaient encore en attente sur Parcoursup. Début septembre, les syndicats étudiants comptabilisaient plus de 400 dossiers de « sans-fac ».
Marie, visage jovial et queue de cheval, se penche pour aider un candidat à remplir un dossier d’inscription. Elle souffle :