Moche contre moche. Moche palais des Congrès de Montreuil, en Seine-Saint-Denis, pour Benoît Hamon, contre moche palais des Sports d’Alfortville, dans le Val-de-Marne, pour Manuel Valls. La veille, ils s’affrontaient tranquillement à la télé ; ce jeudi soir, ils tiennent meetings simultanés, où se sont rendus tout aussi simultanément et tout aussi séparément les auteurs de cet article. Un duel à distance, comme on dit, à l’est et au sud-est de Paris, le dernier avant le deuxième tour de la primaire de gauche, ce dimanche. Classique, chaque candidat s’est choisi un écrin électoral où il a battu l’autre au premier tour : d’une tête pour Valls à Alfortville (38,4 % contre 31,4 %), de deux et demi pour Hamon à Montreuil (52 % contre 19,6 %) avec, dans l’une et l’autre, une participation deux fois plus élevée qu’au niveau national.
À Montreuil, le ruban de foule – ou l’écharpe, vu la température extérieure – commence loin, très loin de l’entrée du palais des Congrès, s’enroule, s’emmitoufle autour du bâtiment de briques et verre devenu démodé certainement une seconde après sa construction. Une foule mouvante, rapide, joyeuse qui se presse vers le meeting de Benoît Hamon. À l’intérieur, on nous oriente aimablement vers la droite et les tables dressées pour la presse. Héhé, pas de ça Benoît, on se dirige non pas au milieu où sont massés les militants, mais vers la gauche où l’on espère trouver cette espèce rare dans les meetings : le non-encarté, le curieux, le sympathisant, le fraîchement convaincu.
Bonne nouvelle côté Alfortville où des militants s’en inquiétaient en sortant du RER tout proche : il y a la queue. Mauvaise nouvelle : c’est parce que la sécurité ne fait entrer qu’au compte-gouttes. Sur le parquet du palais des Sports – en fait une salle de basket festonnée de draps tendus pour masquer les gradins –, ils seront 500 max quand l’organisation en annoncera 800. Dans la queue, deux mecs un peu paumés, pas très au courant de la primaire. « Il reste deux candidats », explique l’un. « Ah ouais ? », s’étonne l’autre l’air de débarquer. « Ouais, Valls et l’autre je sais plus comment il s’appelle. » Légèrement morne, la petite masse des supporters de l’ancien Premier ministre, silencieuse, comme résignée. Certains ont un œil sur leur smartphone d’où arrivent les échos de ce qui, à Montreuil, ressemble à une nouba.

« Aqui se queda la clara… » Eh ouais, à Montreuil, chez Hamon, on a un DJ (également journaliste à Libération, aux Inrocks et écrivain, comme il sera présenté par le Monsieur Loyal du meeting), qu’est-ce que vous dites de ça, les vallsistes ? Et c’est baignés d’Hasta Siempre à la gloire de Che Guevara ou de Bella ciao qu’arrivent les soutiens – la sénatrice PS Marie-Noëlle Lienemann, le filochiste Gérard Filoche, qui n’a pu être candidat faute de parrainages suffisants, le député PS de Paris Pascal Cherki…