«J’espère sortir d’ici en étant allégée d’une partie de ma souffrance pour enfin tourner cette page et recommencer une vie plutôt normale. Même si on sait bien que ça ne sera jamais vraiment le cas. » Clarisse s’est avancée à la barre et, avant toute chose, a dit cette phrase. Comme un credo suivi par la majorité des victimes du 13 Novembre. À 24 ans, Clarisse a échappé à la mort dans le Bataclan. Inspirée par une scène d’un James Bond, GoldenEye, elle a défoncé à coups de pieds et de poings le faux plafond des toilettes pour se réfugier dans les combles de la salle de spectacle pendant des heures et échapper aux balles. Depuis, elle essaie de se reconstruire.
Le 28 septembre dernier, une vague de douleur incommensurable est entrée dans la salle où se tient le procès des attentats de Paris. Elle ne l’a pas quitté depuis. Mais sous ce raz-de-marée se cache un fond d’espoir. Dans le défilé des rescapés et des proches de victimes du Stade de France, des terrasses et du Bataclan
Comment est-ce qu’on reprend une vie après ça ? Comment est-ce qu’on commence une nouvelle journée après ça ? Je ne sais pas. Ce que je sais, c’est qu’on a commencé par rentrer nourrir le chat.
Maya a perdu son mari et deux amies au Carillon. « Je me suis reconstruite mais ce que je voudrais maintenant, c’est vivre, dit-elle d’une voix douce qui transperce le cœur de tous ceux qui l’écoutent à la barre. Vivre, c’est être amoureuse sans culpabiliser, c’est l’insouciance d’une soirée entre amis, c’est avoir les épaules assez solides pour accepter l’échec, accepter les nouvelles épreuves, entreprendre de nouveaux projets, arrêter d’avoir peur de tout perdre à nouveau. » Comme elle, certains ont trouvé d’autres compagnons à aimer. De nombreux autres se sont séparés, ils n’avaient « plus d’amour à donner ». Certains ont fait des enfants, que l’on entend parfois au fond de la salle d’audience. Certains se sont réfugiés dans le travail pour aller mieux. D’autres n’ont pas trouvé dans leur carrière ce qu’il fallait pour se relever. Alors ils ont changé de voie.