Le raisin est quasiment sauf au domaine Voillot, mais une autre inquiétude a pris la relève. Les vendanges s’achèvent, la récolte fermentera bientôten sécurité dans les cuves, définitivement sauvé des risques de grêle et de gel. Mais Jean-Pierre Charlot, le vigneron, passe des examens en cette fin de semaine, pour une grosse fatigue qui ne passe pas. Il ne peut pour l’instant plus travailler, et tout le monde au domaine s’angoisse un peu. Heureusement, l’équipe est solide, soudée. On avance, on termine la vendange, en faisant comme si tout allait bien. Pour la seconde fois seulement depuis 2012, le millésime sera copieux, à tel point qu’il a fallu faire de la place dans la cave, mettre en bouteille une partie des bourgognes 2016, acheter de nouveaux fûts (lire l’épisode 12, « Et le tonneau fut ») et trouver assez de vendangeurs pour ramasser le plus vite possible une récolte déjà mûre.
Au dernier moment, le vigneron avait engagé quatre personnes de plus pour essayer de raccourcir un peu la durée des vendanges, ne pas laisser mûrir plus le raisin, et tenter de ramasser avant la pluie. Mais il était difficile de trouver des vendangeurs cette année en Bourgogne. Sébastien Thomas, conseiller référent de Pôle emploi pour la viticulture dans la région, expliquait la semaine dernière aux vignerons qu’il avait reçu 90 candidatures seulement, pour 1 500 offres d’emploi. Une numéro de téléphone spécial était dédié, comme chaque année, « mais les saisonniers habituels n’ont pas pris contact avec l’agence ».
Le millésime est plus précoce et de nombreux saisonniers ont l’habitude de venir travailler mi-septembre. Par ailleurs, la plupart des régions viticoles françaises ont commencé en même temps cette année, ce qui les met en concurrence sur le marché de la main-d’œuvre saisonnière. Enfin, les équipes du domaine vieillissent, il faut renouveler. Et cela devient de plus en plus difficile de trouver assez de vendangeurs acceptant de souffrir des reins et des genoux (et du foie souvent, le soir) pour un smic horaire. Normalement, les vignerons retiennent 14,15 euros par jour sur les salaires pour la nourriture (petit déjeuner, déjeuner et dîner) et 4,94 euros par nuitée en « dortoir ordinaire ». Pas de ça chez Voillot, on ne décompte rien et les vendangeurs sont payés 10 euros de l’heure et non 9,76 comme prévu dans les textes.
En 2001, la loi s’est assouplie pour permettre aux vignerons d’embaucher plus facilement.