Elle a choisi d’attendre les premiers résultats dans son ancienne école maternelle, à Stains, en Seine-Saint-Denis. Ici, elle connaît Albert, un vieux « coco », elle parle de Corinne la directrice, elle embrasse une copine avec qui elle a grandi. Elle sourit mais ses pieds s’agitent sous le banc d’école. C’est son quartier d’enfance. Prisca Thevenot, 32 ans, affrontait avec l’étiquette En marche Marie-George Buffet dans la 4e circonscription de Seine-Saint-Denis, fief de la communiste. Dimanche dernier, au premier tour, la députée sortante était arrivée en tête (32,8 % contre 25,2 % pour la candidate En marche). À 20 heures et des poussières, les résultats du bureau de vote tombent : sur 285 votants, 158 sont pour Buffet, 127 pour Prisca Thevenot. « Putain !, laisse-t-elle échapper. C’est pas possible, comment elle fait ? J’étais en tête au premier tour. » Elle accuse le coup. À ce moment-là, elle comprend qu’elle a perdu. Dans la soirée, les résultats confirment son intuition. Bureau de vote après bureau de vote, elle le constate : « Elle me mange partout. » Marie-George Buffet obtient 59,6 % des voix, Prisca Thevenot 40,4 %.
La première fois que je l’ai vue, c’était à une formation organisée au QG d’En marche et dédiée aux candidatures féminines aux législatives. Il était question d’autocensure et de légitimité. Elle avait expliqué qu’elle avait hésité à se porter candidate à l’investiture. C’était il y a cinq mois. Après avoir travaillé comme consultante dans les télécoms, Prisca Thevenot est devenue entrepreneure et a mis au point une application de mise en beauté dont elle a reporté le lancement après l’élection. Elle a grandi à Stains mais habite dorénavant à Paris. Tous les jours, depuis son investiture, elle a pris le chemin du 93 et y a fait une campagne de terrain, à la sauce Macron.
Incrédule, un peu sonnée par les premiers chiffres, Prisca Thevenot fonce à la mairie du Blanc-Mesnil, ville de droite, en espérant que les reports y seront meilleurs. Sur le chemin, en voiture, à Stains ou La Courneuve, on ne voit que des affiches de Marie-George Buffet, élue députée pour la première fois en 1997. À un carrefour, plus de 140 affiches sur le même pan de mur. On est chez elle. Mais au Blanc-Mesnil aussi, Prisca Thevenot est à la traîne. « Mais elle a ressuscité les morts ou quoi ? » Elle a du mal à croire que les écarts se soient creusés à ce point par rapport au premier tour.
Pour pleurer ou taper contre les murs, c’est ce soir, parce que demain, on repart.
Tout au long de la soirée, Prisca Thevenot emploie diverses formules qui l’aident à intégrer sa défaite.