Le 24 septembre 2021, j’ai reçu un mail des archives départementales des Yvelines. C’était une réponse à un message… daté du 8 juillet dernier. Ce jour-là, en pleine préparation de cette série consacrée aux cahiers de doléances ouverts dans la foulée du mouvement des gilets jaunes, j’avais envoyé une brève demande pour savoir s’il était, justement, possible de consulter les cahiers citoyens du département. Un mail automatique m’avait alors informé que tout serait mis « en œuvre pour [m’]apporter une réponse rapide ». Ne voyant rien venir, je m’étais finalement passé de cette information, et des cahiers yvelinois, pour nourrir les 41 épisodes précédents de « Monsieur le Président… ». J’ai bien fait car, soixante-dix-huit jours plus tard, avec une célérité à faire trembler Deliveroo, le chef de service des services aux publics des archives des Yvelines m’a informé que, pour ce qui concerne les principales villes du département, ce serait compliqué. « Aucun cahier n’a été transmis par la ville de Mantes, m’a-t-il écrit. Les cahiers provenant de Rambouillet et Versailles sont incommunicables sans examen préalable. Ceux de Saint-Germain-en-Laye ne sont qu’en partie directement consultables. » Et la raison est la même que celle avancée par les autres archives départementales (lire l’épisode 1, « À la recherche des doléances perdues ») : « Lorsque ces cahiers recouvrent des données à caractère personnel », la loi impose un délai de cinquante ans pour les mettre à disposition du public.
Soixante-dix-huit jours pour obtenir une information peu claire, il y a de quoi désespérer de l’administration. Mais depuis que je me suis lancé dans cette quête kafkaïenne pour consulter les cahiers citoyens, j’ai compris qu’il ne servait à rien de s’énerver, pour ne pas devenir fou tel Obélix dans Les 12 Travaux d’Astérix (la huitième épreuve consiste à se procurer le « laissez-passer A38 » en passant notamment par le « bureau du contrôleur de coordination des archives à venir »). Certes, le gouvernement français avait promis que les cahiers citoyens seraient lisibles sur une plateforme numérique