Trois policiers en civil musclés, debout dans l’embrasure de la porte, sont sèchement invités à s’asseoir s’ils comptent assister à l’audience. « Ce n’est ni un libre-service, ni un spectacle », rouspète la magistrate. Ce 19 juin, le tribunal correctionnel de Bobigny doit juger trois de leurs collègues pour violences. Sarah L., 24 ans, Arthur L., 29 ans, et Julien C., 34 ans, appartiennent à la compagnie de sécurisation et d’intervention de Seine-Saint-Denis (CSI 93). Le 28 octobre 2015 vers 17 heures, ils sont à la cité des Francs-Moisins, à Saint-Denis, pour rattraper un gamin de 10 ans qui sillonne le quartier en quad, sans casque. Le ton monte avec des habitants, la situation dérape, les policiers paniquent. Un coup de tête, un coup de pied et un tir de grenade de désencerclement – quatre blessés au total – les ont conduits devant ce tribunal après plusieurs reports.
Une femme d’une vingtaine d’années, prénommée Nawal, est assise sur le banc des parties civiles. Elle a déposé plainte le lendemain des faits. Son visage, encadré par de longs cheveux noirs et ondulés, ne porte plus de traces du coup de tête dans le nez qui lui a valu six jours d’incapacité temporaire de travail (ITT). Nawal raconte qu’elle marchait dans son quartier quand elle est tombée par hasard sur l’altercation entre des habitants et une quinzaine de policiers, en civil et en uniforme. Elle tente alors de rejoindre l’Espace jeunesse pour s’assurer que son petit frère n’ait pas d’ennuis.