Ici pas de « big bang », ni de « mastodontes » : à défaut d’en chasser les vieux acteurs de l’audiovisuel, nous tâcherons de bouter les clichés journalistiques hors de cette série. D’autant qu’en guise de mastodontes c’est plutôt à des dinosaures que nous avons affaire. Une femelle d’abord, née des âges farouches de la création de la télévision, au mitan du siècle précédent : TF1. Un vieux mâle ensuite, à la peau burinée par des décennies à gratter de la part de marché à la tête de M6 : Nicolas de Tavernost, 70 ans. Voilà l’étrange couple qui vient de déclencher un mouvement tectonique à la télévision, à laquelle, rappelons-le, nous abandonnons chaque jour
Il nous faut hélas briser net tout fantasme d’une édition spéciale de Koh-Lanta dans les cuisines de Top Chef mâtinée de The Voice et de L’Amour est dans le pré (dont l’épreuve finale consisterait à écaler des œufs mollets juché sur un poteau en chantant du Vianney pour séduire l’autochtone) : les deux chaînes poursuivront leur diffusion parallèle mais avec un seul et même proprio. Selon le communiqué envoyé lundi soir depuis « Paris, Boulogne-Billancourt, Neuilly-sur-Seine et Luxembourg », soit les différents sièges des protagonistes de l’affaire, « TF1, M6, Bouygues et RTL Group annoncent aujourd’hui qu’elles ont conclu des protocoles d’accord d’entrée en négociations exclusives pour fusionner les activités de TF1 et M6 et créer un groupe de médias français d’envergure ». Le nouveau balèze deviendrait le quatrième groupe européen derrière RTL Group, Canal+ et ProSiebenSat.1, à la différence près que ces trois-là font aussi beaucoup, voire majoritairement, dans la télé payante, quand TF1 et M6 ne vivent, ou presque, que de la pub. Belle envergure donc.

Mais laissez-nous vous faire le tour du futur propriétaire. Les deux bâtiments principaux d’abord : TF1, 20,5 % de part d’audience en avril, et M6, à 9,5 % sur la même période. Et leurs dépendances. Les connues : à savoir les chaînes de la TNT : TMC, TFX, TF1 Séries Films et LCI, pour ce qui vient de la Une, tandis que la Six apporte W9, Gulli, 6ter et Paris Première, la seule télé payante du lot. Soit au total, 42,5 % de la consommation télévisuelle dans la corbeille. Ce qui d’un coup propulse le futur groupe de télé privée bien loin devant la publique France Télévisions et ses 28,4 % d’audience.