«Plus tard, peut-être… » Ainsi répondait par SMS Jean-Michel Lambert, sollicité le 8 juillet dernier par Les Jours, pour évoquer son parcours personnel. Mais mardi soir, celui qui avait été surnommé le « petit juge » a été retrouvé mort chez lui à côté du Mans, un sac plastique sur la tête. Selon les premiers éléments recueillis par la police judiciaire, le magistrat à la retraite de 65 ans se serait suicidé par asphyxie, marqué par les révélations des carnets intimes du juge Maurice Simon. Ce président de la chambre d’accusation de Dijon, qui avait pris la suite de Jean-Michel Lambert pour instruire un supplément d’information sur l’assassinat de Grégory Villemin, avait remis en cause toutes les accusations portées contre la mère de l’enfant. Il a mis en scène son suicide exactement comme le héros de son dernier roman Témoins à charge (Édition de Borée, 2017), le professeur Chabert qui, pour «sauver son honneur», s’étouffe dans un pochon transparent après avoir vidé une pinte de whisky.
Je suis en présence de l’erreur judiciaire dans toute son horreur.
Les investigations du juge Simon avaient conduit la justice à démonter les vingt-cinq charges retenues par Lambert contre Christine Villemin et à prononcer un non-lieu fracassant en sa faveur le 3 février 1993. Dans ses notes personnelles révélées par BFMTV, le juge Simon, décédé en 1994, fustigeait le travail de son prédécesseur : « On reste confondu devant les carences, les irrégularités, les fautes (…) ou le désordre intellectuel du juge Lambert. Je suis en présence de l’erreur judiciaire dans toute son horreur. » Toutefois, les attaques contre les errances procédurales et la folie médiatique du « petit juge » ne datent pas d’hier. Il avait déjà pensé au suicide, « par flashes », comme il le confiait à Libération le 1er septembre : « J’avais repéré l’endroit où ça se passerait. Je savais à quelle rampe d’escalier du tribunal j’accrocherais la corde. »

Ce soir du 6 novembre 1984, afin de corriger son look d’étudiant attardé et de chasser le surnom de « Bibi Fricotin » dont l’a affublé L’Est républicain, le juge a remplacé ses grosses montures d’écaille par des lunettes cerclées d’acier qui le vieillissent un peu et enfilé sa veste pied-de-poule pour se rendre au dîner avec l’éminent journaliste du Figaro Lucien Miard.