De Beyrouth
Abdallah rampe sous la table, façon commando. Il se croit camouflé, mais Mohammed débarque en boîtant avec son pistolet en plastique et les deux jumeaux âgés de 5 ans se mettent à crier à qui mieux mieux pour savoir qui a vaincu l’autre. Puis ils s’élancent en riant dans leur chambre, Abdallah comme une plume, Mohammed plus gauche. En haut de l’étagère, deux cartables flambant neufs prêts pour la rentrée scolaire. Il y a un mois, les deux frères se préparaient à démarrer la maternelle à Beyrouth. Mais la guerre en a décidé autrement : les écoles du pays se sont transformées en centres d’accueil d’urgence pour les centaines de milliers de Libanais, Syriens et Palestiniens fuyant les bombardements israéliens dans le sud, l’est et la banlieue sud de la capitale. Depuis le 23 septembre, plus d’un million de personnes ont été déplacées par l’offensive qui a fait, selon le ministère de la Santé, plus de 1 500 morts, dont 140 enfants, et rasé des villages entiers de la carte. Les deux garçons, eux, en sont réduits à jouer aux guerriers en chaussettes dans la chambre d’hôtel à la moquette rouge du quartier Hamra, leur nouvelle maison depuis juillet.
Car pour ces deux Palestiniens nés à Nuseirat, dans le centre de Gaza, c’est la deuxième fois que la rentrée scolaire est perturbée par la guerre.