Aux policiers qui manifestent depuis bientôt trois mois, le gouvernement aura livré une réponse en deux temps. Le 26 octobre, Bernard Cazeneuve annonçait un « plan pour la sécurité publique » de 250 millions d’euros, en passe d’être complété par son successeur Bruno Le Roux. Ce mercredi, le nouveau ministre de l’Intérieur doit présenter un projet de loi sur la sécurité publique en Conseil des ministres, avant son examen par le Parlement en janvier. Malgré le ramollissement des manifs accentué par les vacances de Noël, il est peu probable que le texte suffise à satisfaire les fonctionnaires.
Les principales mesures sont déjà connues depuis deux mois, et Bruno Le Roux les a rappelées la semaine dernière sur RTL. Les conditions d’usage des armes en sont l’enjeu central. Le gouvernement ne prétend pas révolutionner le cadre légal actuel de la légitime défense, qui implique une riposte « immédiate », « nécessaire » et « proportionnée » à l’agression subie. Mais il veut établir des « règles d’usage des armes communes aux policiers et aux gendarmes ». Pour l’instant, seuls les gendarmes peuvent tirer, dans certains cas bien précis, après sommations – par exemple, sur un véhicule qui s’enfuit après avoir forcé un barrage. Bruno Le Roux compte aussi « aligner les outrages à policier ou gendarme sur les outrages à magistrat » (une revendication du syndicat Alliance, lire l’épisode 2) – c’est-à-dire doubler la peine encourue – et « aller plus loin sur l’anonymisation des procédures ». Sur ce dernier point, la loi permet déjà aux policiers antiterroristes, depuis 2006, de remplacer leur nom par un code, et ce pour des raisons de sécurité. Il s’agit d’étendre cette possibilité à des affaires de droit commun, par exemple en utilisant le numéro de matricule des agents pour que les magistrats, eux, puissent s’y retrouver. Sur ce projet de loi, a priori le dernier consacré à la sécurité du quinquennat, il est probable que Les Républicains déballent un festival d’amendements sur la présomption de légitime défense, le durcissement des sanctions pénales et le retour des peines planchers.
« Concrètement, je pense qu’au niveau national, pas grand-chose n’a changé », se désole Mehdi après plusieurs semaines de mobilisation en pointillés. À Évry, fin octobre, nous avions rencontré ce policier en poste dans une brigade anti-criminalité (BAC) de l’Essonne. Il participait à un rassemblement de policiers, accompagnés de leurs conjoints et enfants, devant la mairie.