Je suis posté devant le commissariat du XVIIIe arrondissement, où des policiers en tenue montent la garde. Il n’est pas encore 9 heures. Tous les commerces sont fermés. Un crachin tiède nage sur les trottoirs. J’aperçois les membres de l’unité Surdoses qui remontent la rue de Chartres à pied. Ils tiennent tous une housse de costume par l’index. On dirait un groupe d’amis en partance pour un mariage. Émilie T. (« Front Kick ») pointe l’édition du Canard enchaîné qui dépasse de ma poche : « Attention avec ça au commissariat… On va faire mauvais effet ! » Le commandant Patrick N. me tend sa housse : « Prends ça, tu passeras mieux, c’est un gilet pare-balles. » Après avoir zigzagué entre les chicanes métalliques, nous entrons dans le commissariat. « Bonjour, brigade des stups, annonce Patrick au guichet. On vient pour l’entraînement au tir. » Quelques personnes se retournent pour observer le groupe avant qu’il ne s’engouffre dans les sous-sols du bâtiment.
On n’a pas souvent les stups ici. Il faut en profiter. Je vais vous pousser un peu dans vos retranchements !
Un instructeur à la silhouette filiforme – près de deux mètres sous la toise – nous attend devant la salle de tir. Le chef de l’unité doit négocier mon passage.
« C’est un journaliste qui nous suit à la brigade.
S’il filme, c’est impossible.
Il ne filme pas. Il a juste un carnet et un stylo.
Avec une caméra, c’est non.
Je vous dis qu’il ne prendra aucune image. Même avec son téléphone. Il entre juste avec un carnet et un stylo.
S’il n’y a pas de caméra, c’est OK. »
Nous suivons l’instructeur dans une salle sans fenêtres. Des néons surplombent un parterre en résine où courent des lignes blanches semblables à celles d’une piste d’athlétisme. Un air froid souffle en direction des cibles. « On n’a pas souvent les stups ici, remarque l’instructeur.