Juste après les attentats de novembre, dans les écoles de mon quartier, celui du Bataclan, j’ai vu naître sous mes yeux une demande de sécurité. Une demande aussi soudaine qu’inextinguible. Comme une plante rampante, elle me semblait alors se nourrir de tout et ne cesser de grossir. Plusieurs mois après, la rentrée des classes qui s’annonce a intégré cette nouvelle donne. Le gouvernement a détaillé ce mercredi des mesures de sécurité pour l’école et déploiera 3 000 réservistes mobilisés pour la surveillance des établissements scolaires. Il espère développer une culture pérenne de la gestion des crises
. Cette nouvelle culture de la sécurité change notre quotidien
, avec des nouveaux réflexes, des contrôles inédits : des gestes qui peuvent paraitre contraignants
ont plaidé Najat Vallaud-Belkacem et Bernard Cazeneuve, ministres de l’Éducation nationale et de l’Intérieur, mais qui sont absolument nécessaires
. En quelques mois, nous avons dû faire l’apprentissage de la vigilance.
Dans les jours qui ont suivi les attentats du 13 novembre, j’ai assisté, hébétée et passive, à des scènes, dans le hall de l’école maternelle du quartier ou dans le réfectoire vide, dont je ne savais dire si elles relevaient de la panique ou de la raison. Une fois qu’ils avaient déposé leurs enfants, des parents s’attardaient pour discuter de la sécurisation du groupe scolaire. Avec une obsession : comment faire si des terroristes veulent pénétrer dans l’école ? Je ne disais rien, je ne prenais pas parti, je les écoutais. Un père voulait absolument voir des soldats en face de l’école. On est tous d’accord là-dessus
, tonnait-il avec sa grosse voix, comme si c’était l’évidence. D’autres parlaient vite, sous le coup de l’angoisse : il fallait des visiophones, il fallait des vitres teintées, il fallait fermer les grilles, il fallait laisser les enfants de maternelle à la porte de l’école comme cela se fait pour la primaire, afin d’éviter la circulation d’adultes, il fallait fouiller tous les sacs à l’entrée, il fallait des portiques, il fallait des films opacifiants sur les fenêtres… Si jamais je ne craignais rien pour la sécurité de l’établissement scolaire, la seule bande-son de ces discussions du matin pouvait suffire à devenir hystérique. Les plus inquiets ont envoyé un e-mail aux familles mais aussi aux élus pour faire des réclamations. La tournure très anxiogène a déplu à certains parents qui ne voulaient pas que l’école se transforme en forteresse.

Un mois après les attentats, à la mi-décembre, une réunion a été organisée dans l’école avec le maire socialiste du XIe arrondissement, François Vauglin, le député de la circonscription, Patrick Bloche, un représentant du commissariat, l’adjointe aux Affaires scolaires de la maire de Paris, Anne Hidalgo, les directeurs de la maternelle et des primaires concernées.