2018, l’année d’Awkwafina

Corentin : Salut Thomas. Si je me souviens bien, il y a quelques semaines, dans ta chronique sur Crazy Rich Asians, tu avais dit que tu ferais une chronique sur Awkwafina.
Thomas : Moui, peut-être…
Corentin : Ah mais si ! J’ai retrouvé le moment où tu le dis :
[01 - brunch.mp3]
“...une meilleure amie rigolote - interprétée par la géniale Awkwafina (faudra que je fasse une chronique sur elle, un jour, tiens)...”
Du coup, comme c’est la fin de l’année, pourquoi tu ne nous parlerais pas davantage d’elle ?
Thomas : Oh ben avec plaisir, mon bon Corentin, d’autant plus que 2018 a été une année particulièrement riche pour Awkwafina.
Corentin : Bon, eh bien commençons par le plus simple : qui est Awkwafina ?
Thomas : Comme tu l’imagines, Awkwafina n’est qu’un surnom. Son patronyme de naissance est Nora Lum. Elle naît en 1988…
Corentin : Ce qui fait qu’elle a eu 30 ans cette année…
Thomas : Je vois qu’il y en a un ici qui n’a pas séché les cours de maths, c’est bien. Je disais donc qu’elle est née en 1988 dans le Queens, à New York, quartier qui lui tient toujours à coeur. Elle est la fille d’un sino-américain et d’une coréenne. Hélas, sa mère décède quand la petite Nora n’a que 4 ans. Elle a donc essentiellement été élevée par sa famille paternelle, notamment sa grand-mère, à qui elle fait encore très régulièrement référence en interview. Pendant son enfance dans le Queens, elle apprend la trompette, ce qui lui donne goût pour la musique.
A l’âge de 16 ans, elle crée le personnage d’Awkwafina, son alter ego exubérant qui se permet de dire et faire des choses que la jeune Nora Lum n’osait pas dire et faire. A cette époque, elle rappe un peu pour ses amis, et apprend la production musicale en parallèle de ses études.
Corentin : Donc si je comprends bien, c’est d’abord par la musique qu’elle se fait connaître ?
Thomas : Oui. Awkwafina est d’abord une rappeuse. Ses textes sont décalés et amusants, ses productions relativement simples fonctionnent bien, et son flow coule naturellement. En 2012, la publication d’un morceau au titre évocateur lui fait gagner un début de notoriété sur Internet.
[02 - my vag.mp3]
Le titre dont nous venons d’écouter un extrait s’intitule My Vag...
Corentin : Oui, donc, pour celles et ceux qui ne maîtriseraient pas l’anglais, ça veut dire “Mon vagin”.
Thomas : Voilà. Dedans, elle compare les mérites de son vagin à ceux de ses adversaires avec des punchlines dévastatrices comme “mon vagin dégage de l’aloe vera, ton vagin ressemble à Tony Danza”, ou encore “Mon vagin, c’est le Parrain 1, ton vagin, c’est le Parrain 3”. C’est une réponse au titre My dick...
Corentin : Je dois vraiment traduire ça ? Bon, on va dire que c’est un synonyme vulgaire de “pénis”.
Thomas : ...au titre My dick de Mickey Avalon, ajoutant ainsi une valeur féministe aux morceaux de la rappeuse. Et si tout ça nous fait rigoler parce que quand même, c’est une chanson marrante, eh bien ses patrons de l’époque n’ont pas été du même avis. Peu de temps après la sortie de la vidéo, elle est virée de son travail du moment.
Mais qu’à cela ne tienne, Awkwafina a persévéré dans cette ligne artistique. En 2014, elle sort son premier maxi, Yellow Ranger. Et cette même année, elle commence à occuper davantage l’espace médiatique en intervenant régulièrement dans Girl Code, une émission de MTV.
Corentin : Ah, voilà. Parce qu’aujourd’hui, la plupart des Françaises et Français qui connaissent Awkwafina, c’est d’abord pour son travail d’actrice.
Thomas : Oui. Après Girl Code, elle lance un mini talk show sur Youtube, TAWK, dans lequel elle interviewe différentes célébrités de seconde zone attablée à un pupitre d’écolier. En 2016, elle a son premier rôle au cinéma en jouant un personnage de stoner dans Nos Pires Voisins 2 après que Seth Rogen, un des acteurs principaux du film, a vu la vidéo de My Vag.
Corentin : Et donc on arrive à 2018, qui a un peu été sa meilleure année, non ?
Thomas : Ca dépend. De l’aveu même d’Awkwafina, qu’est-ce que ça veut dire, “meilleure année” ? Est-ce que ça veut dire que tout ce qui vient après ne peut être que pire ? J’espère que non…
Corentin : Nan mais quand même, elle a joué dans des grosses productions, ce genre de choses.
Thomas : Alors, oui, c’est sûr, en 2018, Awkwafina se sera fait remarquer par Hollywood, grâce à ses rôles dans Ocean’s 8 et, évidemment, Crazy Rich Asians, où elle campe l’hilarante Peik Lin. Ces personnages lui ont offert davantage de visibilité, auprès d’un public plus large et varié, au point qu’elle a animé un des épisodes récents de Saturday Night Live, institution télévisuelle de la comédie américaine.
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Je viens de New York, j’ai grandi à le Queens. Mon père y vit toujours, coucou papa. Les gens pensent qu’il a un accent, et c’est vrai ! Sa voix ressemble à celle de Donald Trump, parce que ce sont tous les deux deux vieilles personnes du Queens.
En parallèle de tout ça, elle a également sorti un nouveau maxi, In Fina We Trust, qui est tout aussi drôle que son premier disque, mais qui aborde également des questions par rapport à sa célébrité naissante et aux attentes que peuvent avoir ses proches. C’est résumé dans la très belle chanson Testify.
[04 - testify.mp3]
Corentin : J’ai bien compris que 2018 avait été important, mais est-ce qu’il ne faut pas craindre ici un feu de paille ? Est-ce qu’Awkwafina peut s’installer durablement à Hollywood ? En somme, pourquoi faut-il garder un oeil sur elle ?
Thomas : Pour plusieurs raisons. Déjà parce que c’est une actrice asiatique, et comme je l’ai déjà dit dans la chronique sur Crazy Rich Asians…
Corentin : ... à réécouter dans le brunch…
Thomas : ...à réécouter dans le brunch… Comme je l’ai dit dans cette chronique, Hollywood a encore beaucoup de mal à représenter les asiatiques en dehors des différents clichés auxquels on va les associer. Awkwafina milite pour une meilleure représentation des personnages asiatiques, pour les sortir des stéréotypes auxquels on les associe encore trop souvent. A plusieurs reprises, elle a refusé des rôles où son personnage devait avoir un accent, par exemple.
Ensuite, parce qu’elle est féministe. A plusieurs reprises, elle s’est exprimée en faveur du mouvement Time’s Up, et son oeuvre en général reflète cet engagement. Et, en tant que femme asiatique, elle s’est également exprimée sur l’intersectionnalité. Elle avait d’ailleurs enregistré un morceau, Green Tea, avec Margaret Cho, autre figure importante du féminisme asiatique américain, pour se moquer des fantasmes associés à la femme asiatique en Occident.
Enfin, parce que c’est une bonne actrice. Les différentes personnes qui l’ont dirigé jusqu’ici sont très satisfaites de son travail. Elle est capable d’improviser sur les tournage, apportant davantage de naturel et de vie à ses personnages. Ce talent n’est évidemment pas percé inaperçu, puisqu’il y a quelques jours, la chaîne américaine Comedy Central a annoncé la production d’une série intitulée simplement Awkwafina, avec l’actrice dans le rôle titre…
Corentin : SANS BLAGUE !!?
Thomas : Eh oui ! La série sera une comédie s’inspirant très librement de la vie de Nora Lum et de la création d’Awkwafina. Comme le tournage n’a pas commencé à l’heure où nous enregistrons cette chronique, on n’a pas encore de date de diffusion, et encore moins d’information sur une éventuelle diffusion en France. Aussi, gardez l’oeil ouvert si c’est quelque chose qui vous intéresse. Ou suivez-moi sur Twitter, parce que je serai le premier à relayer toute nouvelle info à ce propos.
Corentin : C’est bien noté ! On en a appris un peu plus sur l’étoile montante qu’est Awkwafina et on garde un oeil sur elle, en espérant la revoir bientôt sur nos écrans. Merci Thomas, à bientôt !
Thomas : A bientôt !