20 ans plus tard, une Glass périmée (92 - 22/02/19)
C : Aujourd’hui c’est super-héros dans vos croissants, mais on ne parlera pas encore de Disney… non, ça, c’est pour tout le reste de l’année. (Thème SFDL qui démarre) Et j’accueille Benjamin Benoit qui vient nous parler… ah, j’ai l’impression que c’est l’un de ses bons amis qui arrive.
(MUSIQUE)
SFDL : BONJOUR LES AMIS !
C : Bonjour Super-Fac-De-Lettres ! Quel bon vent vous amène ?
SFDL : Ah ahahah ! Aujourd’hui j’ai cru comprendre que vous parliez de Manoj Night Shyamalan ! Il aime bien les supers héros aussi. C’est un de mes cinéastes préférés ! Des motifs partout ! Des retournements carnavalesques ! Des fusils de Chekov ! Quel bonheur pour Super-Fac-De-Lettres ! Mais l’heure tourne, et l’héroïsme m’appelle ! À bientôt les amis !
C : Au revoir, Super Fac De Lettres ! Ah, et voilà Benjamin qui revient en même temps, quelle coïncidence. Salut Benjamin.
B : Eh mais vous laissez rentrer n’importe qui dans vos studios, c’est taré. Donc pardon pour ce retard et euh aujourd’hui euuuuuh Split oui donc Split allez.
BANDE-ANNONCE 1
B : Alors je vais parler un peu de M. Night Shyalaman, un cinéaste très particulier et très ancré dans le paysage cinématographique des années 2000. Pour le dire sommairement, cet homme a connu les extrêmes de popularité critique et commerciale en un laps de temps édifiant. En 2000, il sort Incassable et devient un Dieu vivant, puis il sort Signes, Le Village, et ça se gate fort avec La Fille De L’Eau et Phenomènes, et ça se gâte vraiment très très fort avec Le Dernier Maître de l’Air ou After Earth, qui est une catastrophe sur tous les plans. Et tout ça n’est pas aidé par un égo manifeste du monsieur, qui adore s’octroyer des petits rôles dans ses films. C’est la grandeur et décadence en dix ans et c’est sévère cette histoire.
C : D’ailleurs, il est connu pour ses twists rituels, dont certains sont les plus célèbres du cinéma moderne.
B : Il était mort depuis le début, c’est notre époque actuelle, ils sont zinzins, c’est la faute des plantes, bref plein de choses qui ont rendu son cinéma célèbre, formulé, puis moqué. Dans leurs meilleurs moments, ces twists permettaient de redéfinir la vision qu’on avait de ces films sur la toute fin, et permettaient de les revoir avec un regard nouveau.
Mais ça c’était avant. Le réalisateur commence son comeback avec The Visit en 2015, puis Split en 2017. Deux films à petits budgets bien plus aimé de la critique, et à partir de là il faut fuire cette chronique si n’êtes pas à jour et si ça vous intéresse. Vous avez dix bonnes secondes.
[TWIST ! FAUT PAS REGARDER.]
B : La fin de Split est très ancrée dans son temps puisqu’on découvre que c’est en fait une suite d’Incassable, son film culte de 2000. Film où Bruce Willis est un super-héros qui découvre ses pouvoirs de superforce, mais aussi qu’il a été manipulé par Elijah Price, alias Samuel L. Jackson, qui a causé des centaines de morts d’innocents pour le révéler. Et donc Split, qui met en scène Kevin Crumb, alias la Horde et sa vingtaine de personnalités était plus ou moins l’origin story d’un troisième personnage. En allant voir Split, on ne savait pas que les deux films étaient connectés. Glass vient donc de sortir et c’est la fin d’une trilogie qui s’étale sur presque vingt ans.
[BANDE ANNONCE 2]
B : Glass commence lorsque les trois personnages emblématiques de ces deux films se retrouvent tous coincés dans le même hôpital psychiatrique, pour ne pas dire en confinement forcé, alors qu’une psychiatre incarnée par Paula Watson planche sur le trouble des gens qui se prennent pour des super-héros. Un personnage dont le but est donc d’invalider les deux premiers films. Et à partir de là on ne quittera presque jamais cet institut et son jardin, tandis que trois proches de ces trois persos vont se rencontrer pour, peut-être, déceler une machination… et yadda yadda parce que la mise en place est très lente, et parler du climax ne sert pas à grand-chose maintenant. Donc je vais passer au volet critique.
C : Fais-nous plaisir. Qu’est-ce que ça vaut ?
B : Je comprends tout à fait de quoi on parle. Thématiquement, ça parle de regard, de foi à l’image. C’est un propos toujours souligné par la mise en scène. Incassable était thématiquement très solide puisqu’il confrontait le rationnel et le fantastique dans un curseur qui, même 19 ans plus tard, pourrait paraître surprenant. Mais appliquer cette logique au cinéma d’aujourd’hui fait très pétard mouillé, et ça a l’air volontaire, le dernier tiers du film est probablement très cheap à dessein. Eh oui, le producteur Blumhouse est notoirement fauché.
Une économie de moyens qui pourrait avoir du sens et servir le film mais c’est invalidé par une surcouche de twist que je trouve un peu debilou. C’est mon avis, ça ne sera peut-être pas le votre, encore une fois c’est fort fort clivant. Vous pourrez y trouver du sens, ce n’est pas mon cas, même dans la filmographie de Shyalaman ça fait méchamment hors-sujet.
C : Shyalaman dit avoir écrit ceci en amont il y a longtemps...
G : Et je n’y crois pas une seule seconde. Il tenait un truc avec le twist de Split, et il s’est retrouvé avec un cahier des charges impossible à remplir. ET il y a un message méchamment prescriptif sur les images, les réseaux sociaux, leur diffusion. C’est thématiquement raccord avec le cinéma de Shyalaman, mais je trouve ça un peu neuneu. Allez-y si vous avez vu les autres films bien sûr, mais les américains n’ont pas du tout aimé, et ce sont eux qui maîtrisent le plus les codes des comics tant invoqués dans ce film… c’est un bon indice.
C : Merci Benjamin, et tant pis, c’est pas grave. Tu me redis comment il s’appelle le héros dans tout ça ?
B : Euh, David Dunn. Il a un nom allitératif. Tous les super héros ont des noms allitératifs. C’est un running gag des comics en général. Peter Parker, Miles Morales, tu vois le genre.
C : Eh ben merci Benjamin Benoit.
(Le theme Super Fac De Lettres redémarre)
B : (Un gros temps) … Une pure coïncidence.
À trop vouloir faire dans le gimmick, « Glass » lasse
« Glass », le dernier film de Manoj Night Shyamalan essaye tant bien que mal de recoudre dans un seul long métrage les univers développés dans certaines de ses œuvres précédentes. Un exercice plus que périlleux et qui n’est malheureusement pas réussi, à en croire Benjamin Benoit.
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