C – Aujourd’hui dans les studios des Croissants, on reçoit un Geoffroy Huson de Tom’s Guide qui m’a promis un petit voyage dans le temps. Je savais que la technologie avait bien avancé, mais à ce point ?
G – Non Corentin, je te rassure, on ne va pas vraiment voyager dans le temps, on va juste faire un petit retour en arrière, en 2006, une des époques les plus dévastatrices de la guerre des formats. Je veux parler de la naissance des Blu-Ray.
C – Les Blu-Ray, dévastateurs, vraiment ?
G – Eh bien pour le comprendre on va donc se souvenir de cette période. Le DVD est le format par excellence pour regarder des films à la maison. En sept ans, il a complètement remplacé les vieilles VHS. Mais pour les éditeurs et les fabricants de téléviseurs, ça ne suffit pas. Il faut désormais vendre des téléviseurs et des films en haute définition, et pour ça, le DVD ne marche pas, puisqu’il ne peut contenir qu’une couche limitée d’informations. Du coup, on a deux formats qui vont se livrer bataille : le Blu-Ray et le HD DVD.
C – C’est quoi ça le HD DVD ?
G – C’est un standard de disques qui a été lancé en 2003, soutenu par Universal, Toshiba, Intel Paramount, Warner ou Microsoft. Théoriquement, c’était d’ailleurs le support le plus avancé technologiquement avec un meilleur encodage, de meilleurs codecs et une meilleure protection des disques, notamment contre les rayures. Mais tu t’en doutes puisqu’ils n’existent plus, c’est finalement le Blu-Ray de Sony qui a gagné la bataille.
C – À cause de quoi ?
G – Essentiellement grâce à la PlayStation 3 en fait. Alors que pour lire des disques HD DVD il fallait un module en plus sur la Xbox 360, la PS3 pouvait lire nativement des Blu-Ray en plus des jeux, et surtout est restée pendant longtemps la platine non seulement la plus accessible, mais également l’une des plus performantes pour les Blu-Ray. D’ailleurs, la PS4 est également compatible. Tu lis des Blu-Ray sur ta PS4, Corentin ?
C – Euh non, je devrais ?
G – Pas forcément non, mais c’est vrai que de mon côté, j’ai encore un gros faible pour ces disques, avec leur petite boîte bleue compacte et transparente.
C – Mais avec le streaming et le téléchargement plus ou moins légal, ça sert à quoi ?
G – Ça sert à plein de choses. Typiquement, sur un Blu-Ray tu vas souvent avoir une meilleure qualité sonore grâce aux compatibilités Dolby. Tu vas surtout avoir un max de bonus en plus du film.
C – Oui enfin si c’est pour me taper le bêtisier ou la bande-annonce du film que je vais voir.
G – Ah, mais je ne te parle pas que de ça. Je te parle notamment des making of de tes films favoris, souvent inclus dans les versions collector. Un très bon exemple, c’est Le Seigneur des Anneaux. Si tu prends la trilogie en Blu-Ray en version longue, tu auras quasiment douze heures de film, mais aussi la même longueur en making of pour expliquer le choix des décors, des costumes, la vie sur le tournage ou les différents artistes qui ont aidé Peter Jackson à développer son film.
C’est ça le véritable intérêt d’un Blu-Ray, comme l’explique très bien la grosse voix de la publicité Warner.
[Insert Warner]
C – Bah tu devrais te réjouir que ça ait remplacé le DVD alors ! Pourquoi tu râles ?
G – Je râle parce qu’on est en 2018, douze ans après le lancement du format Blu-Ray, et qu’il continue à se vendre beaucoup plus de DVD dans le commerce que de Blu-Ray justement.
Pour te donner une idée, selon l’institut d’étude de la consommation GFK, il s’est vendu en 2017 en France 60 millions de DVD. Du côté des Blu-Ray, le chiffre n’est que de 12 millions. Il se vend encore cinq fois plus de DVD que de Blu-Ray en France !
C – Oui, mais avec le DVD on a aussi les bonus dont tu parlais…
G – Oui, mais ça n’a rien à voir. Un DVD, c’est une image de 720 pixels par 576. On n’a même pas du 720p. Ça n’est pas de la haute définition. Si tu avais le choix, tu préférerais lancer un film sur YouTube en 1080p ou en 480p ? En 1080p, évidemment !
C – Mais comment tu expliques que le Blu-Ray n’ait pas séduit ?
G – Il y a forcément des raisons. D’abord le prix. Alors que les DVD sont de plus en plus bradés avec des nouveautés vendues à dix euros, les Blu-Ray continuent d’être vendus au prix fort, autour de 20 euros. Forcément, quand on fait les comptes, et bien il y a une différence.
Ensuite il y a le fait que les PC ne peuvent pas lire de Blu-Ray. Non seulement il faut acheter un lecteur spécifique, mais en plus les Blu-Ray ne peuvent pas être lus avec n’importe quel lecteur multimédia comme VLC, contrairement aux DVD. Et puis quand même le président de Blu-Ray Partners France, Laurent Villaume, concède en avril 2017 sur le plateau de 01Net que le Blu-Ray n’était pas une révolution par rapport au DVD, c’est qu’il y a un loup.
[Insert 01Net]
Enfin il y a évidemment la question du piratage. Pourquoi dépenser quasiment 20 euros pour un film en HD alors que tu peux le télécharger gratuitement en Full HD chez toi sans bouger.
C – Mais pour le piratage ça touche aussi le DVD…
G – Oui, mais moins. Déjà parce que quand les DVD sont apparus au tout début des années 2000, les gens n’avaient pas encore de très haut débit. Ensuite parce qu’avec les promotions mises en place, par exemple à la Fnac, tu peux désormais avoir quatre films pour seulement 15 euros. Autant te dire que le DVD mise surtout sur l’achat impulsif.
C – Et tu penses que les offres de streaming ont joué ?
G – Au lancement je ne pense pas. C’était surtout une question de prix qui a freiné les consommateurs. Maintenant, douze ans plus tard, avec le lancement de Netflix, d’Amazon Prime Video ou d’OCS, c’est vrai qu’il y a moins de raison d’acheter un film sur support physique.
Finalement c’est un peu la crainte des éditeurs de films. Ils ont bien tenté de lancer de nouveaux formats, comme le Blu-Ray Ultra HD, compatible 4K, mais ça n’a pas fonctionné, parce que les gens ne sont pas prêts à acheter de nouvelles platines. Aujourd’hui, depuis chez eux, ils peuvent déjà voir certains films ou séries en 4K sur Netflix. Finalement, heureusement qu’il reste les trois ans d’attente en France avant de voir un film sur Netflix. Ça sera peut-être la chronologie des médias qui sauvera le Blu-Ray.
C – Oui, mais ça Geoffroy on en parlera une prochaine fois. Merci pour cette défense acharnée du Blu-ray et à très bientôt !
Blu-ray : le délice d’une galette sensas (mais sans succès)
Contrairement au DVD qui a largement su remplacer la VHS, le Blu-Ray n’a pas réussi à s’imposer comme nouveau format de référence pour les films et les séries. Geoffroy Husson, qui adore cette galette bleue, nous explique pourquoi.
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