« Lady Bird » : un film initiatique charmant qui va à 100 à l’heure

C : Après 3 Billboards : les panneaux de la vengeance et La Forme de l’Eau, dont les chroniques sont disponibles dans Le Brunch, partons à la découverte d’un autre grand favori des Oscars : Lady Bird. C’est le premier film de Greta Gerwig, qui en signe aussi le scénario. Il sera en salles le 28 février mais Morgane Giuliani a pu le voir en amont pour nous en parler, bonjour Morgane !
M : Bonjour Corentin ! Lady Bird est notamment nommé dans les catégories Meilleur film, Meilleure actrice et Meilleur réalisateur. C’est le premier long-métrage réalisé par Greta Gerwig, qui a aussi écrit le scénario, donc. Son nom ne vous dit sûrement rien, mais c’est l’une des figures du cinéma indépendant américain de ces 10 dernières années. Avec Lady Bird, elle prend son envol et montre qu’elle peut tenir seule un projet de bout en bout. Le film a été extrêmement bien reçu par la critique aux États-Unis, où il a aussi été un succès en salle. Il met en scène Lady Bird, donc, une ado têtue et rebelle, qui rêve de quitter la Californie pour étudier sur la côte Est. En attendant, elle est coincée dans un lycée catholique assez conservateur, et doit tenir tête à sa mère, qui essaie de régenter toute sa vie.
EXTRAIT 1
https://www.youtube.com/watch?v=H1Xhq78Xf6k
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C : Lady Bird est donc un film initiatique, ou “coming of age movie”, comme on dit en anglais. Ce genre a été assez prisé par le cinéma indépendant américain au tournant des années 2010.
M : Les films initiatiques ont pour personnages principaux des ados soit “banals”, comme dans Lolita Malgré Moi avec Lindsay Lohan, soit bizarres et peu sociables, comme Juno ou James dans la série The End of the F**cking World. Au passage, on en parle également dans le Brunch. Lady Bird a juste ce qu’il faut de décalé : ses cheveux sont rouges/roses, elle écrit sur les murs de sa chambre, et se fait appeler Lady Bird alors que son vrai nom est Christine. Elle est très insolente, aussi bien envers sa famille que les membres de son lycée.
EXTRAIT 2
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C : Pour autant, le personnage ne paraît pas complètement à côté de la plaque.
M : Cela vient notamment du fait que Greta Gerwig a puisé dans sa propre adolescence pour l’imaginer. Elle-même a étudié dans un lycée catholique privé de Sacramento, avant de se débattre pour partir à New York et y faire carrière. Lady Bird n’est pas à proprement parler autobiographique, mais Greta Gerwig se sert de son expérience pour imaginer une atmosphère d’urgence sous le soleil californien. Comme beaucoup d’ados de son âge, Lady Bird vit les émois du premier grand amour, essaie d’être plus populaire, a honte que sa famille soit pauvre, et s’engueule régulièrement avec sa mère.
C : Cette relation mère-fille est d’ailleurs le fil rouge du film.
M : Lady Bird est une ado qui rêve de partir loin de Sacramento, en Californie, pour faire des études à New York. Sa mère y est farouchement opposée, soutenant que la famille n’a pas les moyens. Elle préférerait qu’elle aille dans une université publique du coin. Au lieu de se décourager, Lady Bird préfère se jeter de la voiture de sa mère alors qu’elles sont en train de rouler, et finit avec un bras dans le plâtre rose fluo. L’ado va souvent dans les extrêmes, persuadée que sa mère, une infirmière débordée, ne l’aime pas. Leur relation est jalonnée de malentendus, quiproquos et prises de tête parfois aussi dures que drôles.
EXTRAIT 3
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C : Le rôle de Lady Bird a valu à son interprète, Saoirse Ronan, une nomination pour l’Oscar de la Meilleure actrice.
M : Et elle n’a que 23 ans. Saoirse Ronan, est en train de monter parmi la nouvelle génération d’acteurs à surveiller à Hollywood. En 2009, elle a tenu le premier rôle de Lovely Bones, thriller où elle incarne le fantôme d’une ado assassinée, qui tente d’entrer en contact avec sa famille pour leur révéler qui l’a tuée. Vous l’avez peut-être aussi vue dans The Grand Budapest Hotel, film de Wes Anderson où elle joue la jolie pâtissière avec une cicatrice sur le visage. Dans Lady Bird, Saoirse Ronan donne vie aux tourments de l’adolescence, une période souvent en dents de scie. L’actrice rit, danse, s’énerve, agace quand il le faut (ça reste une ado), et émeut quand elle fait face à des déceptions. Les scènes les plus appréciables sont celles où elle s’amuse avec sa meilleure amie, tout simplement. Les deux adolescentes ont un humour ravageur.
C : Le film met aussi en avant un autre jeune talent : le Franco-américain Timothée Chalamet.

M : Vous n’allez plus pouvoir échapper encore longtemps à ce New-Yorkais de 22 ans, né d’une mère américaine et d’un père français. Dans Lady Bird, il incarne un jeune ado anarchiste et musicien, assez tête-à-claques, qui fait chavirer le coeur de Lady Bird. Timothée Chalamet est aussi à l’affiche de Call Me By Your Name, également en salles le 28 février, qui lui a valu une nomination pour l’Oscar du Meilleur acteur.
EXTRAIT 4
01:17 - 01:30
C : Ce qui rend Lady Bird singulier par rapport à ses compétiteurs, c’est son montage.
M : Ce n’est pas un film qui prend son temps, ou contemplatif, contrairement à la plupart des coming of age movies. Dans Lady Bird, les scènes se superposent. Un dialogue a à peine le temps de se finir que les images passent à autre chose. Résultat : tout va très vite et Greta Gerwig suggère plus qu’elle ne montre. On assiste plus aux conséquences des choses qu’aux choses elles-mêmes. Ce type de montage peut être vu comme une manière d’illustrer le tourbillon de la fin de l’adolescence, où tout converge : les premières amours, les amitiés bouleversées, les questionnements sur l’avenir professionnel, les familles qui se préparent au départ de leur ado. On est happé par la vie de Lady Bird, aux questionnements universels mais à la personnalité unique. D’autant qu’aucun personnage ne rentre dans une case, chacun a ses subtilités et on est plusieurs fois surpris par la tournure des événements. Seul bémol : beaucoup de questions restent en suspens, et ça peut être un peu frustrant. On n’a par exemple aucune idée de ce que Lady Bird a envie de faire comme métier. Mais cette frustration donne surtout envie d’en voir plus. Quand le film se termine, on est triste de quitter la sémillante jeune femme.
C : Lady Bird est en salles à partir du 28 février, et fait partie des grands favoris aux Oscars, donc ne le loupez pas ! Merci Morgane Giuliani et à très vite !