C : On estime que les teen-movies sont peu ou prou nés en 1985 avec The Breakfast Club. Avec ses personnages aux personnalités uniques mais reconnaissables - comme le bad boy au grand coeur ou la weirdo gentille - ce film américain a créé un genre et est devenu une référence. Mais il aura fallu attendre plus de 30 ans pour qu’un teen movie dont le personnage principal est gay voie le jour. C’est chose faite avec Love, Simon, en salles le 27 juin. Morgane Giuliani l’a vu pour nous.
M : Love, Simon est adapté d’un roman young adult intitulé Moi, Simon, 16 ans, Homo Sapiens de Becky ALBERTALLI, publié en 2015. Il raconte l’histoire de Simon Spier, adolescent timide, travailleur, fan de rock, qui n’ose pas annoncer son homosexualité à sa famille, pourtant très aimante, ni à ses 3 meilleurs amis. Sa vie est bouleversée lorsqu’un élève anonyme fait son propre coming-out sur le blog de son lycée - comme il y en a souvent dans les teen movies. Simon entame alors une correspondance 2.0. avec cet inconnu, et tente de découvrir son identité tout au long du film. Mais l’adolescent se retrouve pris au piège du chantage d’un garçon de sa classe, qui menace de divulguer ses échanges de mail dans leur lycée. La tension monte à mesure que le film progresse. On voit Simon mener une double vie : celles avec ses parents et ses amis, et celle, en ligne, avec son mystérieux correspondant. C’est bien sûr la seconde qui le fait grandir.
EXTRAIT 1
M : Love, Simon est un très joli film, à tout point de vues. Une aura lumineuse et bienveillante s’en dégage. Le casting est réussi - Simon est interprété par Nick Robinson, vu dans l’autre drame adolescent Everything Everything. Sa meilleure amie, aussi mature que drôle, est jouée par Katherine LANGFORD, star de la série 13 Reasons Why, dont la chronique de la saison 2 est disponible dans Le Brunch. Vu la popularité de cette série Netflix, sa présence est un atout de taille. Dans le rôle de la nouvelle élève extrêmement cool, on trouve Alexandra Shipp. Elle incarnera prochainement Storm dans X-Men : Dark Phoenix. Les plus de 25 ans ne reconnaîtront que Jennifer Garner, qui joue la maman de Simon. L’alchimie est palpable entre les adolescents. On les voit évoluer dans les lieux communs des teen movies, dont la soirée de fête déguisée un peu trop arrosée, les balades en voiture et les virées au diner du coin.
C : Love, Simon a tous les atouts pour devenir un film générationnel.
M : D’abord, parce qu’aucun studio d’envergure, la Fox dans ce cas, n’avait jusqu’à ce jour sorti de teen movie où le personnage principal est gay. Et ce film n’arrive pas maintenant par hasard. Grâce à Internet, aux réseaux sociaux, de Twitter à Tumblr, la jeunesse Lesbienne Gay Bisexuelle Trans Queer et + ne s’est jamais autant faite entendre. Elle est plus visible que jamais. De ce fait, elle a besoin de ses propres produits pop-culture dans lesquels elle peut se reconnaître et trouver un appui. Et de par sa visibilité, la pop-culture se tourne plus vers la communauté LGBTQ+ qu’auparavant. On en avait parlé dans une autre chronique du brunch consacrée à la chanteuse Hayley Kiyoko, la première à offrir une pop gay accessible au grand public. D’ailleurs, la bande-son de Love, Simon parlera aux jeunes branchés amateurs de rock, hétéros ou LGBTQ+, qui traînent sur Tumblr : on retrouve Bleachers, Troye Sivan et The 1975.
EXTRAIT 2
C: Aux États-Unis, certaines avant-premières de Love, Simon ont été l’occasion d’engager le débat sur le coming-out avec le public.
M : Love, Simon n’est pas tant une réflexion sur l’amour que sur l’acceptation de soi et des autres. Simon est terrifié à l’idée de faire son coming-out et d’être rejeté. Et le film pose cette question : pourquoi est-ce aux ados homosexuels de faire leur coming-out, justement ? Pourquoi l’hétérosexualité est-elle vue comme la norme, la situation par défaut ? Une scène très drôle imagine les amis de Simon annoncer leur hétérosexualité auprès de leurs parents.
EXTRAIT 3
C : Love, Simon est sorti aux États-Unis en mars 2018, où il a amassé 58 millions de dollars au box-office pour un budget de 17 millions.
M : Ce qui est tout à fait honorable. Et dans l’ensemble, il a été très bien reçu par la critique. Le réalisateur est Greg Berlanti, scénariste et producteur sur Dawson et Supergirl. Pour tourner Love, Simon, il a délaissé pendant un mois la réalisation de Riverdale, série de Netflix ultra prisée par les ados.
C : Le premier film de Greg Berlanti était Le club des coeurs brisés, sorti en l’an 2000. Il racontait la vie d’une bande d’amis gays de Los Angeles, faisant face à la menace du SIDA.
M : Greg Berlanti est lui-même homosexuel. À la lecture du scénario de Love, Simon, il s’est reconnu dans le personnage de Simon. “Les gens ne se rendent pas compte que j’ai passé toute ma vie à voir les histoires d’amour d’autres personnes adaptées à l’écran, mais personne n’a jamais réussi à raconter celles que mes amis et moi avons pu vivre”, a-t-il déclaré au producteur de Love, Simon, Wyck Godfrey, qui a notamment travaillé sur le drame romantique adolescent Nos Étoiles Contraires, un carton au cinéma en 2014.
C : Greg Berlanti a ajouté des éléments de sa propre vie à l’histoire de Simon.
M : On apprend dans Vanity Fair qu’il a inclus au scénario ce qu’un ado aimerait entendre au moment de son coming-out, comme “je t’aime” ou “tu mérites d’être aimé”. Il a aussi ajouté un second personnage gay : Ethan, qui fréquente le même lycée que Simon. Ethan est très exubérant et a un look dit “féminin”. Ce qui lui vaut régulièrement des insultes. Greg Berlanti a eu une très bonne idée en créant ce personnage. Pourquoi ? Parce qu’il amène Simon à s’interroger sur ses propres clichés vis-à-vis de l’homosexualité, et qui l’empêchent d’en parler dans une société hétéronormée.
C : Est-ce qu’on va voir Love, Simon ?
M : Mille fois oui ! C’est émouvant, mais ça ne tire pas dans le mélo non plus. C’est drôle sans être lourd. Ce qui est rare pour un teen movie. C’est un film intelligent qui permet de s’interroger sur son rapport à soi et aux autres. Il montre que gay ou hétéro, l’amour est bel et bien une expérience universelle, que tout le monde mérite de vivre. Bref, Love, Simon est un film de son époque, qui vous permettra de mieux la comprendre.
C : Love, Simon est en salles à partir du 27 juin. Merci Morgane Giuliani et à très vite !
« Love, Simon » : l’indispensable premier teen movie d’envergure avec un protagoniste gay
« Love, Simon » est ce qu’on appelle un teen movie, un film pour adolescents. Jusque-là, rien de bien incroyable. Mais il se différencie par son protagoniste qui se trouve être homosexuel. Une particularité qui, comme nous le rappellera Morgane Giuliani, est une première pour ce genre de long-métrage.
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