Corentin : Le 4 mars dernier, on apprenait le décès de Luke Perry, à l’âge de 52 ans des suites d’un AVC survenu 5 jours plus tôt à son domicile de Los Angeles. Pour certains assidus de la génération Z, il était Fred Andrews le père d’Archie dans la série Riverdale sur Netflix. Pour tous les autres adolescents qui ont grandi dans les années 90, il restera l’éternel Dylan McKay de la série Beverly Hills. Elodie Carcolse de la Réclame, revient sur ce personnage bien moins cliché qu’il n’y paraît.
Elodie : Salut Corentin ! Effectivement, Luke Perry n’est plus, et avec lui c’est une icône de la pop culture qui s’en est allée, une partie de notre enfance et je dois le dire, le premier mauvais garçon dont je suis tombée amoureuse, avant Jordan Catalano d’Angela 15 ans ou Bogdan Drazic quelques année plus tard dans Hartley Cœurs à vif.
Et si chaque génération à son idole télévisuelle qui symbolise cette période qu’est l’adolescence, pour les gamins de la génération Y, biberonnée au Club Dorothée...
Corentin : hum, ça me parle…
Elodie : A qui le dis-tu ! Pour ces adolescents là, cette icône portait le nom de Dylan McKay, le bad boy ombrageux de Beverly Hills. Le type de séries dont le générique est resté gravé dans les oreilles. Pour rappel, ça donnait ça :
Extrait générique https://www.youtube.com/watch?v=QvnSZurSATo
Elodie : Dans Beverly Hills, Dylan était celui auquel les uns voulaient ressembler et que les autres désiraient. Avec ses jeans troués, sa veste en cuir sur T-shirt blanc, sa cicatrice au sourcil et sa nonchalance juvénile, il avait tout du néo James Dean. Un rebel without a cause. Ai-je besoin de vous le traduire ?
Ecoutons Alex Vizorek nous parler de son Dylan au micro de France Inter
Extrait : https://www.youtube.com/watch?v=DmnLr3X07YU 0’40 à 1’01
Elodie : Dylan, c’était le cliché du bad boy tourmenté. Le producteur et scénariste de la série, Aaron Spelling, expliquera dans le magazine Rolling Stone, en 1993, avoir pensé au personnage comme, je cite “quelqu’un qui est un peu dangereux, un peu sur la brèche”.
Mais au fil des épisodes, Dylan gagne en nuance et perd en cliché. Il n’était pas seulement dangereux, violent et tourmenté. Il était également sensible, dramatique et vulnérable, négligé par des parents millionnaires démissionnaires, et déjà alcoolique.
Corentin : ah oui, et tout ça au lycée !
Elodie : Oui. Un gosse de riche qui n’assume pas totalement sa condition. Quand les jumeaux Brandon et Brenda le rencontrent le jour de la rentrée scolaire, c’est un loup solitaire, avec la vieille âme que confère l’expérience. Celui qui lit du Lord Byron, défend la veuve et l’orphelin, vous embarque dans sa Porsche vintage décapotable pour aller admirer le couché de soleil sur la jetée. Et dont on se dit qu’il finira inexorablement par vous briser le coeur. Et pourtant, c’est lui qui, le coeur brisé par Brenda, lui confiera la gorge nouée : “Quelque chose est arrivé… Je suis tombé amoureux de toi et j’ai arrêté d’être un solitaire”. N’en jetez plus, de la chair à canon pour jeunes filles en fleur. Dans la version française, la scène est traduite ainsi :
Extrait : https://www.dailymotion.com/video/x2tes4z
50’51 > 51’01
Elodie : Après, il faut comprendre le phénomène culturel qu’a été Beverly Hills à l’époque pour mesurer ce qu’a représenté Dylan McKay chez les gamins d’alors. Et ce qui fera de Luke Perry, la coqueluche d’une génération.
Corentin: Un phénomène qui explique l’émotion suscitée par sa disparition chez les fans de la série, devenus adulte aujourd’hui, que ce soit en France ou aux Etats-Unis.
Elodie : Exactement. Et pourtant Beverly Hills se présente comme une série pour ados dépeignant les aventures de Brenda et Brandon Walsh, deux jumeaux débarqués du Minnesota, et d’une bande de lycéens fortunés : Kelly, la californienne superficielle et sa copine, la prude Donna, son futur petit ami, le jeune David, le déluré Steve et l’intello de service Andrea. Dylan McKay au milieu faisant figure de brebis galeuse. Si la série pouvait être moquée pour ses clichée, la bande d’ados n’en est pas moins confrontée à un univers aux moeurs très adulte : drogues, alcool, trouble de l’alimentation, avortement, violence conjugale, sida et MST, sexe, cancer… Une série pour adolescents, qui n’attendent pas que les personnages le soient.
Corentin : en effet, mes années lycées ont été beaucoup plus calme. C’est un peu le biais des séries de l’époque. Les personnes sont censées représenter des adolescents, comme dans la série Dawson, mais ils n’en n’ont ni l’âge véritable, ni le quotidien.
Elodie : C’est ça. Des sujets difficiles auxquels, heureusement, la plupart d’entre nous n’étions pas confrontés alors. Pourtant, ils marquent néanmoins durablement les esprits à des âges où l’on se construit encore. La mort de Luke Perry m’a ramené à une époque où je vivais intensément leurs tragédies et Dylan était mon obsession. Une époque aussi où l’on ne sait pas encore ce qui relève ou non d’une relation toxique.
Lorsque la série sort sur les écrans en 1990, Luke Perry a 24 ans et le succès est immédiat. Les acteurs enchaînent les unes de magazine pendant les 10 saisons du show. Les stars de la série Shannen Doherty, Jason Priestley et Luke Perry, soit Brenda, Brandon et Dylan, ont même les honneurs du très réputé Rolling Stones Magazine en 1992 où ils s’affichent en couverture. La série est également nommée deux fois aux Golden Globes en 92 et 93 dans la catégorie “Meilleure série dramatique”. C’est la consécration.
Corentin : Ah oui quand même… / EXTRAIT
Elodie : Entre temps, Luke Perry et ses désormais célèbres favoris deviennent aussi cultes que la coupe de Rachel Green dans “Friends” quelques années plus tard. Dylan quant à lui devient l’idole d’une génération, et incarne une certaine perfection propre à chacun. A son grand désespoir, lui qui détestait l’image de sex symbol dont on l’avait affublé.
En 1996, Doc Gyneco résumait le sentiment ainsi dans son tube “Viens voir le docteur”
Extrait : https://www.youtube.com/watch?v=KnFCNQUTgaU >> 0’17
Elodie : Voilà. Dans le triangle amoureux Brenda-Kelly-Dylan, chacun était sommé de choisir son camp entre les deux meilleures amies. Brenda, bien évidemment ! À cette époque, le surfeur Dylan McKay prend la vague et chavire tout sur son passage, en témoignent les registres des naissances français : 6 917 bébés se voient honorés de son prénom en 1996, contre quelques centaines à peine six ans plus tôt.
Corentin : Ca vient donc de laaaaaa
Elodie : Eh oui, Dylan McKay brûle la rétine et Luke Perry définit le cool pour toute une génération avec ce petit quelque chose d’authenticité en plus : une décontraction naturelle allié à un magnétisme confondant. Dylan est autant un personnage dont Luke Perry ne peut se défaire, qu’une incarnation télévisuelle de lui même. Darren Star, le créateur de la série dira même à ce propos dans les colonnes de Rolling Stones : “Quand Luke est arrivé à l’audition, on s’est dit immédiatement que c’était la bonne personne. Selon moi, il ressemblait exactement à James Dean mais sans l’imiter. Il était juste lui-même.”
Corentin : D’ailleurs, il passait le casting pour interpréter Steve si mes souvenirs sont bons
Elodie : Mais quelle mémoire ! Quoi qu’il en soit, ce rôle lui colle à la peau. Lorsque le revival de Beverly Hills est annoncé avec le casting original, l’acteur refuse de reprendre son rôle. Comme il l’expliquait lui même en 2008 : “Je vais être lié à lui jusqu’à ma mort, mais ça me va car j’ai créé Dylan McKay. Il est à moi”. Toutefois l’acteur expliquait encore en janvier dernier qu’il n’entendait pas l’incarner jusqu’à son dernier souffle.
Rien de vraiment surprenant à ce qu’il assure son come back avec un rôle de figure tutélaire, ersatz d’un Dylan McKay devenu adulte et père dans Riverdale, faisant le trait d’union entre les adolescents d’hier et ceux d’aujourd’hui. Il se disait d’ailleurs ravi de jouer quelqu’un de son âge.
Pourtant, de la série Oz où il interprète le révérend Jérémiah Cloutier, au 5e Element de Luc Besson en passant par John from Cincinnati et Riverdale, c’est Dylan qui transparaît à chaque apparition. Et si Luke Perry n’est plus, Dylan McKay reste éternel.
Corentin : Les fans et cinéphiles pourront d’ailleurs le découvrir dans le prochain film de Quentin Tarantino, Once Upon a Time in Hollywood dans lequel il joue… un acteur. La boucle est bouclée. Merci Elodie pour cette chronique remplie d’une nostalgie bienvenue, et à la prochaine.
https://www.youtube.com/watch?reload=9&v=nB8cq6TElSA&t=17s
Luke Perry : le beau Dylan sera « jeune pour toujours »
La disparition récente de Luke Perry a secoué toute une génération de fans de l’acteur mythique de « Beverly Hills ». Élodie Carcolse de « La Réclame » en fait partie et nous explique la Dylan-mania qui a traversé le début des années 1990.
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