Corentin : Quelques mois après la polémique des oeufs contaminés au fipronil, il est temps à présent de réhabiliter cet aliment économique et universel. Pas vrai Thomas ?
Thomas : Bonjour Corentin. Effectivement, ça n’est plus un secret pour toi, j’aime les oeufs.
Corentin : Oui, tu nous avais fait une chronique ovo-centrée il y a quelques semaines...
Thomas : [interruption] Oui, d’ailleurs, pour la réécouter, abonnez-vous…
Corentin : Du coup, qu’est-ce que tu nous racontes aujourd’hui ?
Thomas : Je vais parler scotch eggs, un plat typiquement britannique popularisé par chez nous grâce au mouvement gastro-pub.
Corentin : Gastro-pub, gastro-pub… c’est pas un truc qui va nous rendre malade quand même ?
Thomas : Alors ça dépend… mais en fait non, qu’est-ce que tu me fais raconter ? Non, gastro-pub, c’est le pendant anglo-saxon de ce qu’on appelle par chez nous bistronomie. Soit un courant culinaire visant à anoblir des plats jusqu’ici populaires, souvent servis dans les bars ou les petites brasseries. En France, le grand représentant de ce mouvement est Yves Camdeborde, que vous connaissez si vous avez regardé Masterchef par le passé. On l’entend ici en 2016, à l’antenne d’Europe 1, expliquer justement comment lui est venue l’idée de la bistronomie :
Moi je viens du Sud-Ouest, où on a cette forme de chaleur humaine. J’ai toujours vécu de par mes parents, mes grands-parents, dans ce monde de la table. Donc c’est un monde où il y avait la relation humaine, où l’humain était quand même le plus important avant tout. Donc j’ai voulu dépoussiérer entre guillemets tout de ce que j’avais appris. J’ai gardé les bases, j’ai gardé la façon de cuisiner, j’ai gardé la façon de choisir les produits. Le même respect qu’on pouvait avoir dans ces maisons pour les clients, j’ai essayé de le conserver, mais je me suis dit “On va le faire dans une ambiance bon enfant”.
Corentin : Je vois bien le concept, mais que vient faire le scotch egg dans tout ça ?
Thomas : Le scotch egg, à la base, c’est un classique de la cuisine anglaise, souvent consommé lors de picnic, donc froid. Il consiste en un oeuf dur entouré de chair à saucisse, que l’on pane avant de le faire cuire.
Corentin : Ah oui, de la bonne nourriture réconfortante. Et en quoi c’est de la nourriture “gastro-pub” si c’est d’abord mangé en picnic ?
Thomas : On va faire un peu d’histoire pour comprendre ça. L’origine du scotch egg remonterait au milieu du XVIIIe siècle, et pourrait être inspirée d’une forme de kefta préparée dans le nord de l’Inde. A l’origine, il était servi chaud. Comme c’est relativement simple à faire, les foyers britanniques l’ont rapidement adopté notamment pour le picnic. Mais outre Atlantique, avec l’ouverture de nombreux pubs suite à la vague d’immigration irlandaise de la deuxième moitié du XIXe siècle, le scotch egg servi chaud est devenu aussi commun que les frites ou les tourtes à la viande. C’est toujours le cas aujourd’hui.
Corentin : Je comprends mieux. Et du coup, comme tu as dit que c’était facile à réaliser, j’imagine que tu vas nous donner la recette…
Thomas : Alors, c’est facile à réaliser, mais y’a quelques gestes techniques quand même, donc on va y aller pas à pas.
Corentin : Parfait ! J’enfile mon tablier, et on y va.
Thomas : Donc pour cette recette, vous allez commencer par cuire un oeuf frais par personne. Personnellement, je les aime mollet (blanc cuit, mais jaune un peu coulant), mais libre à vous de les faire durcir entièrement. Pour cuire un oeuf mollet, vous faites bouillir de l’eau. Quand ça frémit bien, vous plongez délicatement votre oeuf et vous comptez entre 6 minutes et 6 minutes 30. Ca dépend de la taille de l’oeuf. Une fois que c’est cuit, refroidissez le tout de suite dans un bain d’eau froide, pour arrêter la cuisson.
Corentin : Qui aurait cru que cuire un oeuf était si compliqué ! Alors pour qu’il soit mollet, on plonge l’oeuf dans de l’eau bouillante pendant 6 à 6 minutes et demi, et on refroidit immédiatement dans l’eau froide. Et pour un oeuf dur ?
Thomas : On laisse un peu plus longtemps, entre 8 à 10 minutes. Pendant que votre oeuf refroidit, vous allez préparer l’enrobage. Prenez donc entre 100 et 150 grammes de chair à saucisse. Vous allez façonner une boule avec, que vous allez aplatir doucement. L’idée, tu l’auras compris Corentin, c’est de faire un disque suffisamment grand pour qu’il puisse contenir l’oeuf. D’ailleurs, pour faciliter la prise en main, je vous recommande d’aplatir votre viande sur un film plastique. Comme ça la chair n’accrochera pas à votre plan de travail.
Vous assaisonnez votre disque de viande : sel et poivre évidemment, mais aussi pourquoi pas de la poudre de curry, de la moutarde, des herbes fraîches… Faites-vous plaisir, c’est ça qui va différencier votre scotch egg d’un autre.
Corentin : Donc on aplatit la viande sur un film plastique, et on en fait un disque plus grand que l’oeuf. Et on assaisonne. On peut utiliser d’autre viande que de la chair à saucisse ?
Thomas : Oui, mais il faut veiller à ce qu’elle soit assez grasse, pour une meilleure tenue et pour que ça ne soit pas trop sec. On peut donc opter pour de l’agneau haché, de la chair de chorizo frais ou du boeuf haché contenant au moins 20% de matière grasse. Côté végétarien, ça s’envisage très bien avec des légumineuses en purée compacte, comme des pois chiches ou des haricots secs.
Corentin : Ah, oui, comme pour les falafel en fait.
Thomas : Tout à fait ! Mais revenons à notre scotch egg. Votre oeuf est froid, il faut maintenant l’écaler - ou l’éplucher - avec précaution surtout s’il est mollet : vous ne voulez pas percer le jaune. Vous placez votre oeuf au milieu du disque de viande, et doucement, vous allez rabattre les bords. L’objectif est bien entendu d’enfermer l’oeuf dans la viande. Donc prenez votre temps et faites une belle bouboule. Si vous avez utilisez la technique du film plastique, ça devrait être plus simple. Evidemment, une fois la boule formée, il faut retirer le film. Et maintenant, il faut paner à l’anglaise !
Corentin : Qu’est-ce que c’est encore que ce truc ?
Thomas : C’est très simple. Vous allez préparer 3 assiettes. Dans la première, versez une main de farine. Dans la deuxième, battez un ou deux oeufs en omelette. Et dans la troisième, versez de la chapelure. Vous pouvez évidemment la préparer vous même avec des restes de pain rassis que vous aurez mixé et fait sécher au four. Vous vous saisissez de la bouboule et vous la roulez dans la farine, au sens propre. Vous allez ensuite plonger la bouboule enfarinée dans l’oeuf battu. Enfin, vous la roulez dans la chapelure. Pour une croûte plus épaisse, vous pouvez répéter les opérations 2 et 3 une deuxième fois.
Corentin : OK, donc un fois qu’on a enfermé l’oeuf, on le pane, d’abord dans la farine, puis dans l’oeuf, et enfin dans la chapelure. C’est pas salissant, tout ça ?
Thomas : Si ! C’est pourquoi il faut toujours paner d’une seule main. Vous gardez l’autre main propre, et vous êtes bien content. Il ne reste plus qu’à cuire. Deux options s’offrent à vous. Ma méthode préférée - et la moins healthy - est la friture. Pas besoin d’un bain d’huile, ça peut se faire à la sauteuse sans problème. Donc dans une sauteuse, vous faites chauffer de l’huile à friture. Il faut que le fond de la sauteuse soit couvert d’huile. Quand c’est chaud, déposez doucement les scotch eggs. Faites cuire en remuant régulièrement, que tout soit bien doré. Ca doit prendre environ 15 minutes. La deuxième méthode est plus saine et se fait au four. Vous déposez vos scotch eggs sur un plat allant au four, et vous faites cuire à 190°C pendant 20 à 25 minutes, jusqu’à ce que ce soit doré. Pendant ce temps-là, vous pouvez écouter un peu de musique :
FICHIER 02 - DJ SCOTCH EGG
Corentin : Qu’est-ce que c’est que ça, Thomas ?
Thomas : C’est un artiste bruitiste japonais qui s’appelle DJ Scotch Egg et qui fait, entre autre, des reprises de musique classique comme celle-ci. Je me suis dit que ça irait bien avec le thème… Bref, quand vos scotch eggs sont cuits, servez-les, sur un lit de salade par exemple, ou accompagné d’une bonne purée des familles pour un repas moins léger.
Corentin : Bon ben encore une fois tu nous auras donné faim ! Merci pour la recette, pas merci pour la musique, et à bientôt, Thomas !
Thomas : A bientôt !
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