Corentin : Bonjour Geoffroy, aujourd’hui on va parler smartphone, mais pour une fois pas de l’écran, de la photo ou des caractéristiques. Mais de quoi on va parler alors ?
Geoffroy : Mon cher Corentin, bonjour. En fait on va parler de la seule chose qui distingue encore une marque de smartphone d’une autre, du moins sous Android, c’est-à-dire le logiciel.
C : Et c’est ce qu’on a tendance à appeler la surcouche d’un téléphone.
G : C’est bien ça. Enfin plus précisément de l’interface utilisateur, parce que la surcouche est plus précise et certains constructeurs proposent de véritables dérivés d’Android. On ne va pas se compliquer la vie et on va tout regrouper sous le terme « interface utilisateur », c’est plus simple.
En gros l’interface utilisateur, ce sont les menus, les gestes, l’écran d’accueil, l’écran avec toutes les applications ou les différents paramètres qui sont dans ton smartphone. Tout ce que tu vas voir une fois le smartphone allumé. Et si tous les smartphones se ressemblent avec de plus en plus de doubles appareils photo ou d’écran sans bordure, l’interface, elle, reste particulière à chaque constructeur.
C : Pourtant, quand j’utilise le téléphone de mon voisin qui est tout comme moi sous android, je ne suis pas perdu pour autant, alors qu’est-ce qui change vraiment ?
G : Eh bien les icônes d’application, les paramètres, la personnalisation de l’écran d’accueil, tout ça va grandement changer d’un constructeur à un autre. Par exemple sur un smartphone Nexus ou Pixel de Google ou un Motorola, tu vas avoir une interface assez basique. Tu as un tiroir d’application, qui te permet d’ouvrir l’écran applications, un écran Google Feed à gauche de l’accueil, quelques paramètres rapides en haut de l’écran de notifications et un ou deux réglages en plus. Et c’est tout. Un peu comme sur les nouveaux smartphones d’Archos…
[Insert Archos]
De l’autre côté de l’échelle, tu vas avoir Samsung, Huawei ou LG qui proposent beaucoup plus de réglages. Tu peux choisir une interface Android classique ou quelque chose plus proche d’un iPhone, avec toutes les applications sur l’écran d’accueil, tu peux modifier la colorimétrie de l’écran, tu as un mode nuit, souvent plusieurs modes d’économie d’énergie. Parfois même la possibilité d’inverser les touches de navigation retour et multitâche en bas de l’écran.
C : Et est-ce que tous ces ajouts n’ont pas un impact sur la fluidité du smartphone, quand même ?
G : Ça a clairement été le cas. Samsung a longtemps été pointé du doigt pour son interface maison, Touchwiz, réputée particulièrement lourde, notamment en comparaison de Sense, celle de HTC. Mais aujourd’hui, du moins sur le milieu et haut de gamme, ça ne change pas grand-chose. En fait le problème que posent ces surcouches, c’est vis-à-vis de Google, qui développe Android…
C : On imagine qu’ils ne voient pas d’un très bon oeil les constructeurs qui modifient leur système.
G : Ils ont beaucoup beaucoup râlé oui, mais jamais vraiment clairement. Sans parler des constructeurs chinois, comme Xiaomi ou Meizu qui avaient tendance à copier très clairement l’interface de l’iPhone, on va s’intéresser aux relations entre Google et Samsung.
Samsung a longtemps voulu faire bande à part sur Android, avec une interface, Touchwiz, particulièrement voyante. En 2013, le constructeur coréen avait même développé une interface particulière pour ses tablettes, baptisée Magazine UX. L’interface en question, qui n’a finalement jamais vu le jour, changeait considérablement la manière d’interagir avec un appareil qui tournait pourtant sur Android. Une liberté prise par le fabricant coréen qui n’a pas plu du tout à Google qui lui a fait savoir : des surcouches, d’accord, mais on doit voir que derrière c’est Android.
Pendant des années, les relations sont restées très tendues entre Samsung et Google. À tel point que plusieurs rumeurs ont évoqué le développement, chez Samsung, d’un système d’exploitation concurrent d’Android. Baptisé Tizen, il était destiné à équiper les smartphones hauts de gamme de la marque. Pendant deux ou trois ans, lors de ses conférences de presse, Samsung évitait même soigneusement de prononcer les noms de Google et d’Android.
C : Mais rassure-moi, ils se sont rabibochés depuis ?
G : Et oui, parce que Samsung s’est rendu compte qu’il avait besoin d’Android et surtout de ses millions d’applications. Tizen a été relégué aux bracelets et montres connectées de Samsung. Pour la présentation du Galaxy S8, Samsung a enterré la hache de guerre et a finalement reparlé d’Android. Mieux, le constructeur aurait fait appel à Google afin d’optimiser sa propre interface, TouchWiz, finalement rebaptisée Samsung Experience. Ensemble, ils ont allégé la surchouche et permis aux utilisateurs de choisir l’interface qu’ils souhaitent, comme l’expliquait DJ Koh, le PDG de Samsung en mars dernier :
[INSERT SAMSUNG]
Alors un petit mot de traduction quand même. Il dit : « De nouveaux services et solutions qui font de votre smartphone le portail vers des appareils intelligents chez vous. Beaucoup d’entre eux ont été améliorés grâce à notre relation spéciale avec Google ». En langage marketing c’est un peu comme s’ils se roulaient une pelle, autant dire qu’on revient de loin.
C : Ça veut dire quoi ? Que Google accepte à nouveau les interfaces des constructeurs ?
G : Mieux, Google semble les encourager ! Auparavant, les constructeurs encapsulaient les icônes des applis dans des formes adéquates afin de garder une homogénéité selon l’appareil. Avec la sortie de la dernière version d’Android, Oreo, Google permet désormais aux développeurs de générer plusieurs formes d’icônes en fonction de l’appareil sur lequel l’application sera installée. Ce n’est pas encore bisous-bisous, mais c’est clairement un premier pas vers l’acceptation des surcouches de la part de l’éditeur d’Android.
C : Eh bien, merci Geoffroy pour ce point sur les surcouches de nos téléphones. On se revoit pour une prochaine chronique tech et gadgets !
Android : face à Google, les constructeurs en remettent une surcouche
Geoffroy Husson de « Tom’s Guide » nous parle aujourd’hui des surcouches de nos téléphones. On ne dirait pas, mais en coulisses, ces environnements logiciels sont au centre d’un véritable bras de fer entre les constructeurs et Google.
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