Lucie : Corentin, j’ai une question pour toi. Qu’est-ce qui t’effraie le plus entre ça :
[Son d’une bête qui fait peur, encore à trouver]
… ça …
[Son du bruit affreux dans The Ring]
Ou ça :
[Extrait d’une publicité pour Facebook]
CORENTIN : réponse
L : Eh bien tu seras peut être surpris d’apprendre que beaucoup de personnes ont surtout peur de Facebook. Récemment, des gens ont paniqué en réalisant quelque chose de tout bête. Il est possible de trouver quelqu’un sur Facebook en tapant son numéro de téléphone dans la barre de recherche. Faites le test : mettez un numéro, le vôtre ou celui d’un ami, et vous tomberez très probablement sur le compte de la personne en question. Plutôt flippant non ?
CORENTIN : réponse
Beaucoup de choses que font Facebook nous font peur. Mais il y a aussi des choses que le réseau social ne fait pas, et qui nous effraient quand même. Par exemple, vous avez sans doute déjà entendu parler de cette rumeur : Facebook serait capable de nous écouter grâce au micro de notre smartphone, pour ensuite nous proposer des publicités qui s’inspirent de nos conversations.
CORENTIN : QUOI ??? Ils font ça Lucie ??
L : Bah non, bêta ! Si c’était vrai, ça serait effectivement effrayant, et très préoccupant. Sauf que c’est faux. Facebook n’utilise pas votre micro pour vous écouter. Le réseau social l’a même précisé dans un communiqué de presse en 2016. C’est écrit noir sur blanc : “Facebook n’utilise pas le micro de votre smartphone pour personnaliser vos publicités ou ce que vous voyez sur votre fil d’actualité”. Vous ne les croyez peut être pas. Mais moi si, et je vais vous expliquer pourquoi : ce n’est pas que Facebook ne veut pas, mais c’est qu’il ne PEUT PAS vous écouter.
CORENTIN : Pardon, excuse-moi, j’étais distrait. Je le micro de mon téléphone d’ouate pour éviter que Facebook nous espionne. Donc tu disais que c’était techniquement pas possible ?
L : Eh bien, imagine. Il y a plus de deux milliards d’utilisateurs sur le réseau social. Tous ne parlent pas anglais. Il est simplement impossible techniquement qu’un logiciel puisse écouter toutes ces personnes, comprendre leurs conversations en contexte, pour ensuite envoyer des informations cohérentes et utiles à la plateforme publicitaire de Facebook. Le tout en quelques secondes. Cela requiererait une intelligence artificielle très pointue, et beaucoup, beaucoup d’ordinateurs pour faire des calculs très puissants. Pour le moment, en tous cas, Facebook n’a pas les ressources pour faire ce genre de choses. C’est de la science fiction.
CORENTIN : du coup, pas la peine de se méfier de Facebook ?
L : Si, mais il faut être un peu plus réaliste. Oui, Facebook a aujourd’hui les moyens de vous surveiller, et sans vous écouter par votre smartphone. Début mars, la journaliste du Wall Street Journal Joanna Stern a écrit un super article récapitulant les différentes manières dont le réseau social surveille vos habitudes en ligne, et même loin de vos ordinateurs. Par exemple, Facebook a recours aux service de “data brokers”, des entreprises qui se spécialisent dans le recueil et la revente de données entre différentes sociétés. Il peut s’agir d’informations comme votre historique d’achat dans un magasin ou si vous possédez une voiture. Ces données sont anonymisées, mais peuvent être croisées à des comptes sur les réseaux sociaux, pour enrichir des immenses bases de données.
CORENTIN : Et j’imagine que c’est sans compter sur ce qu’on lui donne déjà de bon gré !
L : Exactement. Même sans cette aide extérieure, Facebook a déjà accès à de nombreuses données sur vous. Vous y avez peut être un jour inscrit votre date de naissance, donc votre âge, votre ville d’habitation, vos études… puis vous avez liké des pages, rejoint des groupes. Bref, vous avez déjà dit beaucoup de choses sur vous et vos goûts. Et si vous utilisez les applications de Facebook sur mobile, c’est encore pire. Elles ont accès à plein d’informations supplémentaires, comme votre localisation ou les autres applications que vous utilisez sur votre téléphone. Enfin, il ne faut pas oublier que Facebook fonde ses activités sur les revenus publicitaires. C’est même son business principal. Par exemple, Facebook vend des bouts de code que l’on peut installer sur des sites Web, et qui permet de savoir où vous allez sur Internet. C’est pour ça que quand vous cherchez à acheter des chaussures, vous avez ensuite plein de publicités pour des chaussures qui s’affichent sur Facebook.
[MUSIQUE FLIPPANTE - Taylor Swift]
CORENTIN : et pour se protéger de tout ça, on fait quoi ? On supprime Facebook ?
L : C’est la solution la plus simple et la plus radicale. Mais là encore, il faut être réaliste : Facebook est un service utile, et dont il est difficile de se passer au XXIe siècle. Plutôt que d’avoir peur et de ne rien faire, mieux vaut prendre les devants. Facebook propose plein d’options qui permettent de limiter la surveillance de notre comportement. Voici quelques idées que je vous propose :
Rendez vous dans les paramètres de votre compte Facebook. Vous y trouverez une rubrique sur les publicités. Là, Facebook vous propose de consulter votre profil publicitaire, c’est à dire ce qu’il devine sur vous. C’est ce genre d’informations auxquelles ont accès les annonceurs. Dans les paramètres de cette rubrique, vous pouvez désactiver une partie des publicités ciblées. Facebook ne surveillera plus vos activités en dehors de Facebook pour vous proposer des réclames selon vos goûts. Vous pouvez aussi demander à ce que vos intérêts et votre profil sur Facebook ne soient pas utilisés par d’autres sites ou services.
CORENTIN : Rien que ça, ça a l’air déjà bien planqué. T’as d’autres astuces ?
Toujours dans les paramètres de publicités, cliquez sur la catégorie “vos informations”. Là, vous pouvez supprimer à la main les informations de votre profil que vous ne souhaitez pas donner aux annonceurs. Par exemple, dans mon cas, j’ai supprimé : anniversaire en juin, femme entre 25 et 30 ans, vient de rentrer de voyage.
Il y a encore plein d’astuces, mais je vais manquer de temps, donc une dernière pour la route. Vous vous rappelez de cette histoire d’annuaire inversé dont je vous parlais en début de chronique ? Voici comment désactiver cette option. Rendez-vous dans les paramètres, puis dans “confidentialité”. Là, vous pouvez demander à ce que seuls vos amis puissent vous retrouver grâce à votre numéro de téléphone. Et vous pouvez même supprimer votre numéro de Facebook, si ça vous embête : ça se trouve aussi dans les paramètres de confidentialité.
CORENTIN : donc Facebook nous surveille, mais nous avons encore, un peu, le contrôle.
L : Oui ! A noter que tout ce que je viens de vous dire pourrait vite changer. A partir du mois de mai, Facebook va devoir se mettre en conformité avec le réglement européen de la protection des données, le RGPD. Ce dernier prévoit notamment un recueil clair du consentement des internautes sur l’exploitation de leurs données. Prenez quand même le temps d’aller dans les paramètres, et choisissez ce qui vous met à l’aise, ou non. Ca prend vingt minutes et ça vous rassurera … peut être.
CORENTIN : Mmmmmhhh, t’auras décidé de nous laisser dans la crainte jusqu’au bout, décidément ! Merci en tout cas Lucie, nous voilà averti ! À bientôt.
Facebook nous espionne-t-il vraiment avec son microphone ?
La possibilité d’utiliser Facebook comme un annuaire inversé a fait paniquer beaucoup de monde récemment. Avec Lucie Ronfaut du « Figaro Tech », on fait le point sur l’étendue de l’espionnage de Facebook, entre fantasmes et réalités.
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