Corentin : L’âge d’or de Canal Plus semble être bel et bien terminé… Après des audiences catastrophiques et une réputation qui peine à retrouver sa saveur d’antan, le président du directoire du groupe Canal+ a annoncé la dissolution de Canal Play. La faute à qui, à quoi et pourquoi ? Angèle Chatelier fait le point.
Angèle : « Aujourd’hui, Netflix est dominant, archi dominant, voire monopolistique ». Ça, ce sont les mots de Maxime Saada. Le président du directoire du groupe Canal + a annoncé que Canal Play, l’offre de vidéo à la demande par abonnement de Canal + serait supprimé d’ici quelques semaines. La faute à Netflix ? Oui, probablement.
Mais il faut aussi revenir aux prémices de Canal Play. Ce service payant de vidéos a été ouvert le 8 novembre 2011. 14 ans après la création de Netflix par Reed Hastings.
C : A l’époque, Canal Play se voulait être le Netflix à la française
A : En proposant aussi, selon les formules, l’accès à la chaîne cryptée, aussi. Dès 2015, comme Netflix, Canal Play s’est aussi mis à faire des « créations originales ». Parmi les plus connues, Le Baron Noir ou encore le Bureau des Légendes (EXTRAIT 1)
A l’été 2018 pourtant, rappelle Maxime Saada, Canal Play est passé de 800 000 à 200 000 abonnés. Il faut dire que ça ne sentait déjà pas bon pour la plateforme : en décembre 2017, elle avait même pris la décision de fermer l’application disponible sur mobile. Tout le contenu devenait disponible uniquement sur l’application MyCanal.
C : Peut-on dire qu’ils n’ont pas trouvé leur place ?
A : Ils se sont surtout perdus. Canal Play permettait d’accéder à environ 10 000 programmes différents, films, séries, dessins animés. Mais il existait aussi Canal VOD, une autre formule qui permettait la location de films ou séries dont Canal a les droits.
C : Et puis… peut-on vraiment dire que c’est la faute de Netflix ?
A : Il faut pour cela tout comparer. Netflix compte aujourd’hui près de 130 millions d’abonnés partout dans le monde.3 millions en France. Le service, il est vrai, défie toute concurrence. Sauf que Maxime Saada met le point sur un autre problème qui expliquerait selon lui la mort de Canal Play : les contraintes imposées par l’Autorité de la concurrence. Selon lui, elle aurait interdit au groupe d’avoir des exclusivités sur Canal Play.
C : Et tout ça, c’est un vrai mic-mac
A : Oui. On s’en souvient, tout a commencé en 2015 lorsqu’Altice, propriétaire de SFR en France, acquiert de nombreux droits à la diffusion d’évènements sportifs exclusifs. La Premier League ou La Ligue des Champions, pour ne citer qu’eux. Cela a considérablement affaibli le groupe Canal + et ses abonnements. Canal cherche alors à s’allier à BeIN Sports, l’une des plus grosses chaînes payantes d’événements sportifs, mais l’autorité de la concurrence refuse cet accord. Nouveau coup dur.
Toutes les mesures d’austérité à l’encontre de Canal Plus arrivent le 22 avril 2016
Parmi elles, la détention de droits de certains films, séries, événements, par exemple. C’est notamment parce que quelques années avant, Canal avait acheté les chaînes Direct 8 et Direct Star et que ça l’Autorité de la concurrence, elle aime pas beaucoup beaucoup.
C : C’est le principe même de l’ouverture à la concurrence
A : Exactement. Si un groupe a le monopole, alors tout le reste n’existe plus. C’est donc peu ou prou ce que dénonce, aussi, Maxime Saada.
C : L’autorité de la concurrence avait pourtant allégé quelques sanctions
A : Oui, mais n’était-ce pas trop tard ? Effectivement, en juin 2017, elle annonce que Canal a le droit de distribuer à l’avenir une chaîne premium, comme BeIn Sport. Le groupe peut aussi désormais racheter des droits de diffusion auprès de six grands studios américains pour la TV payante.
C : Est-ce que, finalement, Canal Plus va si mal ?
A : On peut quand même noter que pour l’heure, Canal Plus domine toujours les accords d’achats de droits de films français. Ce n’est pas ça qui va concurrencer Netflix, mais ce n’est pas non plus négligeable. Cependant, Canal Plus va mal, c’est une évidence. La suppression de Canal Play n’est qu’une métastase d’un cancer bien présent depuis de nombreuses années.
C : Comment l’offre que proposait Canal Play va-t-elle évoluer, alors ?
A : Le catalogue de Canal Play était déjà disponible à l’offre Start By Canal, un service accessible depuis l’application MyCanal sur les outils technologiques. Maintenant, Canal doit miser sur ses productions originales et tous les droits des films qu’il possède. Car fin 2019 arrivera Disney Play qui possède déjà les droits de la 21st Century Fox, par exemple. Une plateforme qui accueillera en exclusivité aussi, forcément, les productions Disney et LucasFilm. Alors qui devrait avoir le plus peur, Netflix ou Canal, finalement ?
C : Merci Angèle Chatelier d’avoir fait le point sur la fermeture de Canal Play et la descente aux enfers des chaînes du groupe Canal. Un jour peut-être, retrouvera-t-elle un âge d’or ? L’avenir nous le dira. A très vite !
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