COCO : 300.000 euros de budget, un but honorable mais de nombreux dysfonctionnements … SAIP, l’application du gouvernement français pour alerter la population d’attentats et d’autres évènements graves, n’est plus. Lucie Ronfaut du Figaro Tech revient sur l’histoire de ce service, et ses alternatives ...
Lucie : Fin mai, le gouvernement a annoncé l’abandon de SAIP. Cette application était censée alerter ses utilisateurs d’un attentat ou d’un évènement grave survenu en France. Elle a néanmoins subi de nombreux dysfonctionnements. Le contrat avec le prestataire qui développait l’application, la société française Deveryware, n’a donc pas été renouvelé. SAIP aura vécu deux ans.
COCO : qu’est-ce qui n’a pas fonctionné ?
L : Déjà, il faut comprendre le fonctionnement de SAIP. L’application se fondait sur la géolocalisation du smartphone pour alerter d’un évènement grave à proximité de ses utilisateurs. Par exemple, si un attentat se produisait à Rennes, les internautes à Rennes devaient recevoir une notification d’alerte. Voici l’extrait d’un reportage de CNews lors du lancement de SAIP, en juin 2016. Le préfet du Rhône Michel Delpuech expliquait ses grands principes aux journalistes.
[EXTRAIT REPORTAGE]
SAIP a été officiellement lancé pour l’Euro de foot. Et depuis, elle n’a … jamais marché. Parmi ses couacs connus : elle s’est déclenchée trois heures après l’attentat de Nice, en juillet 2016. Plus récemment, en décembre, l’application a envoyé un message d’alerte à ses utilisateurs en Seine-Maritime pour les prévenir d’un attentat. Il ne s’agissait en fait que d’un exercice de sécurité. SAIP est aussi restée muette lors de la prise d’otages dans un supermarché à Trèbes, le 23 mars.
Forcément, SAIP a été très critiquée, par les utilisateurs comme les politiques. Il faut dire que l’application aurait tout de même coûté près de 300.000 euros au gouvernement. Dans un rapport publié en août 2017, le sénateur Jean-Pierre Vogel (Les Républicains) recommandait déjà l’abandon de SAIP. Il proposait, à la place, de se tourner vers la technologie de diffusion cellulaire, en collaboration avec les opérateurs mobiles, pour envoyer des messages aux utilisateurs de téléphones à proximité d’un évènement grave.
COCO : et ça marche, ce genre d’alternatives ?
L : Oui ! L’avantage de la technologie de diffusion cellulaire, c’est qu’elle ne passe pas par la 3G ou la 4G. N’importe quel portable, même ancien, peut recevoir un message d’alerte. Il est envoyé sous forme de SMS, en passant par les antennes des opérateurs téléccom : de cette manière, seules les personnes dans la zone géographique concernée recoivent l’alerte. Ce système est par exemple très utilisé au Japon, pour prévenir de tremblements de terre ou de tsunamis.
Pour le moment, néanmoins, le gouvernement a choisi d’autres solutions. Suite à l’abandon de SAIP, il a signé plusieurs partenariats (non financiers) avec les principaux géants américains du Web et des réseaux sociaux (Facebook, Google et Twitter) ainsi que des entreprises françaises (Vinci Autoroutes, la RATP, Radio France, France Télévisions). Le but est de diffuser plus largement ses informations en cas d’attentat ou de catastrophes naturelles.
Ce nouveau dispositif s’appliquera de différentes manières selon les plateformes. Sur Facebook, le ministère de l’Intérieur pourra publier ses informations sur une page dédiée en cas d’activation du dispositif «Safety Check». Ce système est enclenché automatiquement par Facebook si le réseau social détecte des messages de ses utilisateurs parlant d’une catastrophe.
[FACEBOOK]
Quand beaucoup d”utilisateurs autour de vous signalent un évènement à proximité, cela peut activer le système Safety Check. Vous pouvez ensuite vous signaler en sécurité, pour rassurer votre famille et vos amis.
Sur Twitter, le gouvernement a lancé un nouveau compte, intitulé «Beauvau_Alerte»: les internautes le souhaitant pourront demander à recevoir des notifications sur leur smartphone, leur signalant tout «évènement majeur de sécurité». Twitter mettra aussi en avant les tweets d’information du ministère sur le fil d’actualité de ses utilisateurs français, toujours en cas de catastrophe. Enfin, Google affichera les messages du gouvernement à ses utilisateurs effectuant des recherches liées à un évènement en cours.
COCO : c’est une bonne idée ?
L : Il y a deux manières de voir cette nouvelle initiative. D’un côté, le gouvernement explique qu’il veut utiliser des solutions qui sont déjà très populaires auprès des Français. Et c’est vrai que nous sommes nombreux à utiliser Facebook, Twitter et Google. Il est logique de vouloir alerter la population via ces canaux.
Mais on peut aussi regretter le fait que les autorités se reposent sur des entreprises privées, et américaines, pour parler aux citoyens. Surtout quand il existe des moyens plus simples, et plus efficaces que SAIP, d’alerter la population … sans demander de l’aide aux géants du Web.
COCO : Voilà qui est très clair. Merci Lucie de nous avoir parlé du cas SAIP. Et à très vite.
SAIP, l’histoire d’une application qui n’a jamais marché
SAIP, le fameux système d’alerte et d’information des populations pour informer les gens en cas d’attaque terroriste ou de catastrophe, a été arrêté, deux ans seulement après sa mise en place par le gouvernement. Lucie Ronfaut du « Figaro Tech » fait le point sur cet échec et nous parle des alternatives.
0:00
6:24
Vous êtes sur une page de podcast. En cas de difficulté pour écouter ce document sonore, vous pouvez consulter sa retranscription rapide ci-dessous.