Corentin : Nous l’avons vu partout : Philippe Gildas, surtout connu pour avoir animé pendant dix ans l’émission Nulle Part Ailleurs sur Canal + est mort. Ce que l’on a vu, c’est que cela avait créé un vif émoi dans les médias. Mais pourquoi cet homme a-t-il tant marqué le champ télévisuel ? Angèle Chatelier prend un peu de recul sur la situation.
Angèle : Impossible d’être passé à côté. Philippe Gildas, sa bonne humeur, son ton si charismatique. Et son décès, le 28 octobre dernier.
Pourtant toi Corentin, moi, n’avons pas vraiment grandi avec Philippe Gildas. Nous sommes cette génération d’après qui n’a pas connu réellement la belle époque de Canal +. L’âge d’or de la télévision, aussi. Car à la question « pourquoi la mort de Gildas a-t-elle créé un tel émoi dans les médias », c’est bien par là qu’il faut commencer. Philippe Gildas représente l’âge d’or de la télévision avec l’émission Nulle Part Ailleurs et celui de la radio.
C : Un homme plein de qualités
A : « Il ne regardait personne, ni rien, de haut », disait Marc Olivier Fogiel sur CNews en rendant hommage à Philippe Gildas. « Il était tout le temps bienveillant. Bienveillant avec les autres, très à l’écoute des gens qui l’entouraient », a-t-il encore ajouté. Une qualité rare dans la télé, on le sait. C’est sûrement ce qui a distingué Philippe Gildas de beaucoup d’autres.
Vincent Meslet, ancien président de France 2, d’Arte et producteur à pour la boite de production TelFrance a écrit un livre sur Jean-Luc Delarue : la star qui ne s’aimait pas. Dedans, il dit : « Personne ne connait ni n’envisage la violence de la télévision tant qu’il ne l’a pas vécue ». Cette violence, elle ne semble pas faire partie du sang de Philippe Gildas. La bienveillance, c’est ce que l’on a perdu en télé. Et bienveillant, c’est ce qu’il était Philippe Gildas.
C : Et outre sa bienveillance, Gildas est connu pour être le père de nombreux animateurs à succès aujourd’hui.
A : Pour beaucoup, c’est un dénicheur de talent. Un propulseur de carrière. La grande et belle époque de Canal + est née et a vécu avec lui, vous le savez. A la fin des années 80, Philippe Gildas participe à la création de l’un des meilleurs talk show de tous les temps, le premier « infotainment » à la Quotidien que l’on connaît aujourd’hui : Nulle part ailleurs.
C : Là-bas, il propulse Antoine de Caunes et José Garcia
A : Ses deux comparses, créateur de nombreux sketchs hilarants (EXTRAIT 1)
Sur BFMTV, Philippe Vandel a aussi déclaré, très ému, que Gildas était son papa en télévision. Le journaliste qui officie désormais sur Europe 1 tenait une chronique entre 1994 et 2001 dans Nulle Part Ailleurs. (EXTRAIT 2)
Karl Zéro est aussi un fils spirituel, si je puis dire, de Philippe Gildas. A sa mort, l’ancien chroniqueur dans Nulle Part Ailleurs déclarait sur RTL : « c’est la mort de la télévision tout court. La télévision qui était libre de ton, qu’on aimait faire et que tout le monde aimait bien regarder ». Ce qui corrobore avec ce que je vous disais au-dessus : Philippe Gildas, son travail et ses émissions représentent une télévision proche des gens, rigolarde et informative en même temps. C’était la naissance de « l’infotainment ». Ce qu’il en reste aujourd’hui, à quelques différences près, nous pourrions dire que c’est le talk show de Yann Barthès, Quotidien.
C : Si sa mort a tant ému les médias, c’est parce qu’il est aujourd’hui difficile de retrouver le ton de ses émission
A : Je parlais de bienveillance en début de chronique et il est vrai que cela n’existe plus vraiment à la télévision. Qu’est-ce que l’on a aujourd’hui ? Cyril Hanouna, principalement.
Slate a fait un papier très poussé sur le sujet : Hanouna serait l’antipode de Philippe Gildas au sens où avec les émission de Baba, si j’ose dire, c’est le clivage qui prime.
On le voit dans les derniers débats dans son émission Balance Ton Post : pour ou contre l’avortement ? Jacqueline Sauvage est-elle innocente ? Nous sommes bien loin, ici, de la bienveillance de Philippe Gildas, et du rire de ses chroniqueurs et humoristes. Avec Cyril Hanouna, tout est sujet à disputes, à débats. Cette télévision là n’existait pas dans les années 90.
C : Non, Philippe Gildas, c’était plutôt le rire (EXTRAIT 3)
A : On le voit rien qu’au nom de son autobiographie publiée en février 2010 : « Comment réussir à la télévision quand on est petit, breton, avec de grandes oreilles ». L’homme qui a quitté Canal + depuis 2001 rejoint alors l’équipe de Ruquier dans son émission On n’demande qu’à en rire, sur France 2. Il y est juré.
Le rire de Philippe Gildas, c’est un rire que semble-t-il, beaucoup retiendront. Parce qu’il représente la télévision d’avant : celle où l’on riait tout en informant, sans créer de débats ou de clivages. Celle où il ne s’agissait pas de se moquer gratuitement, mais pour faire rire. Avec l’autre. C’est peut être pour cela que tant de médias se sont émus de son décès : aucune personnalité aussi bienveillante que Gildas n’existe aujourd’hui à la télé.
C : Et il faut dire que parmis les plus fervents admirateurs de cet homme de télévision, on trouve énormément… de personnes qui travaillent à la télévision. Merci Angèle Chatelier pour ces éclairages ! A très vite !
0:00
5:19
Vous êtes sur une page de podcast. En cas de difficulté pour écouter ce document sonore, vous pouvez consulter sa retranscription rapide ci-dessous.