Corentin : Dans Pékin Express, on doit se débrouiller avec un euro par jour... ça n’a rien d’exceptionnel, un abonnement des Croissants coute six fois moins cher ! Mais soudainement, le jeu phare de M6 est revenu après quatre ans d’absence. Du coup on a appellé Benjamin Benoit, notre maître-raleur en concepts de télévision. Salut Benjamin !
Benjamin : Salut Corentin, ohlala cette réputation que tu me colles ! Moi j’aime juste les bons concepts, je râle quand ils sont maltraités ou quand il stagnent. Du coup, quelle ne fut ma surprise quand M6 a vu son jeu, Pékin Express, stagner et devenir moins bien et se voir déserté des spectateurs... puis le relancer en 2018 après un hiatus de quatre ans, sans changer grand- chose. Donc c’est partiiiiii pour un tombereau de reproches. Tiens, je te met le générique.
[LE GENERIQUE TOTALEMENT DE PEKIN EXPRESS]
C : Euh... ça m’a tout l’air d’être le générique de l’émission américaine The Amazing Race ça.
B : Mais pas du tout auhhuheuhh. Donc je rappelle le principe du jeu-phare de M6 de la deuxième moitié des années 2000. Une dizaine d’équipe en duos voyagent à travers une poignée de pays par étape en faisant la course. Une course limitée dans le temps et dans la journée, puis après ils se débrouillent et dorment chez l’habitant. Mais ils font pas vraiment la course puisqu’avec un euro par jour et par duo, ils sont toujours dépendant du hasard du stop en voiture. Un jeu par étape permet d’immuniser une équipe contre l’élimination, la première arrivée gagne une amulette, un gain potentiel de 10 000 euros en bout de course. La dernière équipe saute, ou peut-être pas, c’est une histoire compliquée.
C : Une course à élimination indirecte, donc.
B : C’est pas vraiment une course. Donc allons-y, changeons cette chronique en Vlog Youtube, voici « les trucs qui m’énervent dans Pékin Express ».
C : Pékin Express ??? Faux !! Bref. On y voit des Français mal se compter à l’étranger.
B : C’est horrible, surtout quand il traversent des pays asiatiques où les codes sociaux sont différents. Des images de compatriotes malpolis, hurler sur des locaux, où juste mal se compoter en général parce qu’ils sont en pleine course, on voit que ça et ça me fait grincer des dents. Cette saison se termine à Tokyo, je suis à la fois super curieux et un peu effrayé par rapport à ça. D’ailleurs, ils ne castent que des gens qui parlent à 20% anglais. Du coup ils sont tous le même langage Pékin Express trop chelou. Ils disent tous les mêmes trucs. Itseu competition my friend pliz pliz nomaunay. Je te jure que si j’ai un américain qui arrive à Mach 2 vers moi avec son caméraman et qui me dit ça je serai pas à mon avantage.
C : D’ailleurs, le casting est toujours aussi archétype ou désagréable.
B : Ils sortent des trucs bizarres ou malaisant en permanence... interview d’une candidate. « Mon mari me dit souvent que je ne sert à rien ». Ouhla d’accord. Lors du premier épisode, un duo doit abandonner à cause de la mort soudaine du père de l’un des deux. Interview dans la presse de la concernée : «Je me suis dit ’Mais qu’est-ce qu’il me fait ?’ Je lui en ai d’abord voulu. Comment pouvait-il me faire ça alors que j’étais en train de vivre une odyssée pareille ? » donc ok ils sont zinzins, donc devant l’émission tu n’as aucune empathie pour personne, du coup ça marche pas du tout.
C : Il y a quand même un duo plutot inédit dans ce genre de format...
B : Oui, une dynamique entre une boss et son employé, je n’ai jamais vu ça ailleurs et c’est plutot malin. Vite vite vite un autre défaut !
C : Là je vois que tu as écrit « des gens chantent horriblement tout le temps », mais ça m’a l’air un grief injuste ça.
B : C’est pas très SACEM-friendly surtout. Non mais c’est pour parler de l’horrible sound design de l’émission, de son montage nul... tu sais, du genre à griller le suspense d’un ordre d’arrivée des équipes parce que hé ! La lumière du jour n’est pas la même. Et toujours cette narration affreuse de real-tv française où tout le monde repête en boucle les enjeux. J’ai déjà râlé sur ceci avec Top Chef.
C : Tiens, les rèlges sont mal pensées et un peu injustes.
B : Oui parce que la clé d’une émission mal produite est avant tout le fruit d’un raisonnement à rebours un peu nul. Du genre : je veux voir cette séquence, du coup je fais cette règle là. Chaque étape a ses propres règles, si t’es pas habitué elles sont incompréhensibles, et généralement ça se retourne à la figure des producteurs. Exemple : ils doivent sortir de bagnole pour faire un parcours à deux sur un petit vélo. Mais c’est impossible si t’as pas une maîtrise de physique, du coup ils essayent tous cinq secondes et font le tronçon à pied en traînant le vélo. Bon bah merci d’être venu hein.
C : Mais pourquoi t’as parlé d’injustice ?
B : En fait les amulettes gagnées sont pas des gains de fin d’étapes, elles se transmettent d’éliminés en joueurs restants jusqu’à la fin, du coup une équipe peut gagner avec rien du tout et c’est déjà arrivé. Héhé, M6, pas folle la guêpe ! Et cette saison est sous le joug du DUEL final. L’équipe qui arrive en dernier défie une autre de son choix sur une épreuve et le dernier sort. S’ils sont malins, ils peuvent le faire exprès et sniper une équipe qu’ils jugent nulle. Bon, d’une ils sont incapable de faire preuve de métagame et de deux on ne gagne de l’argent que si on nous donne des amulettes, du coup il y a un peu de jeu social.
C : Oh je sais, on parle d’enfants qui dansent ???
B : HAAAN MAIS NAAN. C’est le pire ça. J’explique. Ils veulent toujours faire la même chose : la course s’arrête, du coup ça dort chez l’habitant, et démarre le concours de l’image la plus condescendante possible. Et vazi que « ohlala ils n’ont rien, ils nous donnent tout », et vazi que je danse avec des gosses, ohlala c’est l’émotion la plus presctiptive de la décennie, je m’en vais. On m’avait vendu une course moi, pas un jeu avec des zinzins et des relous. Je suis très colère. Parce que l’idée de ce jeu est très bien et ils en font n’importe quoi.
C : Bon bah en va rendre l’antenne avant que Benjamin ne deviennent insultant. Va prendre ton sympatox© Benjamin ! C’est que de la télé !
B : Mais c’est du gachis ! Du gachis ! Aaaaahhh c’est important ! Je vais me rouler par terre !
0:00
6:23
Vous êtes sur une page de podcast. En cas de difficulté pour écouter ce document sonore, vous pouvez consulter sa retranscription rapide ci-dessous.