Clara Luciani sort son premier album, « Sainte-Victoire », entre Françoise Hardy et PJ Harvey

C : Depuis le milieu des années 2010, la scène francophone féminine connaît un profond renouveau, avec l’arrivée de jeunes artistes touche-à-tout, qui mélangent la chanson française à la pop ou au rock. On peut citer Cléa Vincent, Juliette Armanet - Victoire de l’album révélation de l’année 2018 avec Petite Amie - ou Fischbach. L’une d’elles, plus discrète jusqu’à présent, est Clara Luciani. Morgane Giuliani nous parle aujourd’hui de son premier album, Sainte Victoire, disponible depuis le 6 avril chez Initial Artist Services.
M : Bonjour Corentin ! Carla Luciani a 26 ans, nous vient de Septèmes-les-Vallons, ville proche de Marseille où Zinedine Zidane a fait ses premiers dribbles. À 19 ans, elle se rend à un concert de La Femme à Cannes, et se retrouve à danser avec Marlon Magnée, le chanteur du groupe, sans s’en rendre compte. Ce dernier est séduit par sa voix et lui propose de “monter à la capitale”, comme on dit, pour rejoindre la joyeuse petite bande.
EXTRAIT 1 : baisser après 19 secondes
M : Pour celles et ceux qui n’en ont jamais entendu parler, La Femme est le groupe français le plus révolutionnaire de ces 10 dernières années. Il propose une pop barrée, psychédélique, poétique et romantique, avec un côté disco irrésistible. En à peine 2 albums, Psycho Tropical Berlin et Mystère, La Femme a donné un nouveau souffle, c’est vraiment peu de le dire, à la pop française. Ils ont rempli le Zénith de Paris en janvier 2017, et sont familiers des festivals.
C : Elle n’avait pas attendu La Femme pour faire de la musique.
M : Clara Luciani raconte dans une interview au Parisien qu’elle a vendu tous ses jouets d’enfant à 11 ans pour s’offrir sa première guitare électrique. Et d’emblée, elle s’est mise à composer ses propres morceaux. Ses idoles ? Nico, PJ Harvey, Patti Smith, ou encore, Françoise Hardy. Autant d’influences qui hantent sa musique. Elle continue à collaborer avec La Femme mais ne fait plus officiellement partie du groupe. Par la suite, Clara Luciani monte un duo anglophone nommé Hologram. Puis elle commence à voler de ses propres ailes sous son vrai nom, et en français.
C : Le talent de Clara Luciani se répand comme une traînée de poudre dans le milieu de la musique.
M : Elle est sollicitée de toutes parts : Raphaël, Benjamin Biolay l’invitent à jouer en première partie de quelques-unes de leurs dates respectives, où elle se retrouve seule en scène avec sa guitare. Le rappeur Nekfeu lui propose un featuring sur le titre Avant tu riais, issu de son album Cyborg. Et ce, avant même que son premier EP sorte.
C : En 2017, elle dévoile un premier EP, Monstre d’amour,
M : Dès ce premier mini-disque, le niveau est très haut, et elle se montre en madonne pleureuse, comme un mélange entre Barbara et Lana Del Rey. Il est produit par Benjamin Lebeau, du duo électropop français The Shoes, et Ambroise Willaume, connu sous le nom de scène Sage, et membre du trio Revolver.
EXTRAIT 2 : baisser le son après 11 secondes
M : Ce titre, Comme toi, résume bien le style de Clara Luciani : des chansons d’amour superbes, avec une grandeur qu’on croyait perdue. Un savant et élégant mélange entre guitare, cordes, basse, entre rock et chanson. Et cette voix. Une voix grave, magnifique, envoûtante, qui rappelle ses origines corses. Sa voix l’a d’ailleurs longtemps complexée, et elle a commencé à l’accepter en écoutant Nico, chanteuse du Velvet Underground.
C : En 2017, elle enchaîne les concerts tout en peaufinant son premier album, Sainte Victoire.
M : Ce premier disque offre un rock groovy, qui ne sacrifie pas le lyrisme sur l’autel de la mélodie qui tue. Il contient notamment le single La Grenade, qui commence à avoir son petit succès. C’est une véritable pépite disco-pop. Sur scène, je peux vous dire qu’il fait bouger le public.
EXTRAIT 3 : baisser le son après 15 secondes
M : Pour Clara Luciani, ce titre est une manière de s’affirmer en tant que femme artiste à part entière. Dans une interview au Magazine du Monde, elle expliquait avoir essuyé pas mal de remarques sexistes par des professionnels du milieu de la musique lorsqu’elle tournait seule, avec une ingénieure du son. Désormais, elle est accompagnée de 4 musiciens.
C : Pour son 1er album, Clara Luciani a renoué avec Benjamin Lebeau, de The Shoes, et Ambroise Willaume. L’artiste électropop rémois Yuksek s’est joint à eux.
M : Tout ce beau monde offre une production des plus ciselées, c’est vraiment un travail d’orfèvre. Il faut écouter ce disque au casque ou aux écouteurs pour espérer en saisir les surprises cachées à droite et à gauche. Les effets sur la voix ne sont, pour une fois, pas accessoires. Ils aident à créer une imagerie mystique. On écoute Monstre d’amour :
EXTRAIT 4 : baisser le son après 14 secondes
M : Sur ce 1er album, Clara Luciani prouve qu’il est tout à fait possible, en France, de faire un album rock élégant, qui parle d’un chagrin d’amour, sans pour autant être ennuyeux ! Car si ce disque a pour base une rupture très douloureuse, il s’élève peu à peu vers une forme de résurrection exaltante. On assiste, chanson par chanson, à la renaissance d’un coeur qui se croyait éteint. Quoi de plus universel comme thématique, pourrait-on penser. Sauf que l’universel n’a pas toujours la grâce troublante de Clara Luciani. Plus qu’un disque d’amour, Sainte Victoire est un disque de femme qui grandit, s’apprivoise et donc, appréhende mieux le monde autour d’elle. Dans le titre Drôle d’époque, elle se libère des injonctions contradictoires que la société lui impose, et tente d’imposer à toutes les femmes.
EXTRAIT 5 : baisser après 18 secondes
M : Sainte Victoire est un grand disque, qui prend aux tripes, au corps et au coeur. Je vous conseille vraiment de voir Clara Luciani en live, elle a une voix fabuleuse, une prestance hypnotique. Elle se produira notamment au festival Solidays le 24 juin, le 11 octobre 2018 à la Gaîté Lyrique, mais c’est déjà complet, vous pouvez encore vous rattraper le 29 janvier 2019 à La Cigale.
C : Sainte Victoire, le premier disque de Clara Luciani, est disponible chez Initial Artist Services. Merci Morgane Giuliani et à très vite.