B : Accrochez-vous bien à votre siège, je vous ramène dix ans en arrière. Et plus précisément en 2008. C’est aussi le cas de la suivante, mais 2008 c’était une année musicalement bénie, avec plein d’artistes cools qui sont venus et qui sont repartis tout aussi discrètement. Cajun Dance Party, les Virgins, NASA, NERD, Ladyhawke, Q-Tip. C’était bien, on se la donnait. Mais moi je me rappelle surtout des matinées sur Nova à écouter… ceci.
[A PUNK]
B : A-Punk, ce foutu morceau, et son foutu riff de guitare qui est très bien à petites doses, mais en dix ans la publicité et la télévision en général a incroyablement forcé avec ce titre. Mais ce n’est pas grave parce qu’autour de lui, il y a un chouette album, un chouette groupe et un chouette gars. A l’époque, Ezra Koenig, le mec le plus gentil du monde, avait 25 ans.
C : Bonjour Benjamin ! Manifestement, tu vas nous parler du groupe Vampire Weekend. Mais pourquoi gentil ?
B : C’est un groupe qui respire la gentillesse, le chill et la chaleur à fois, c’est incroyable. Et surtout, la bienveillance. Quand, il y a dix ans, Oasis s’est séparé en live à Rock En Seine, je me souviens très nettement avoir vu Ezra Koenig consoler des jeunes fans en pleurs. Il sont trop gentils. Donc oui, Vampire Weekend. La combinaison… d’un truc effrayant… et d’un truc sympa. Vampire Weekend c’est, dans l’ensemble, plutôt sympa. Même s’ils laissent des notes foirées dans leurs enregistrements, écoutez c’est subtil mais on entend un petit savonnage.
[BRYN]
C : Ah oui, on entend une corde à vide en trop. Il faut dire que c’était un groupe universitaire, il ne devaient pas crouler sur l’argent pour refaire des prises sur leur premier album.
B : Effectivement, comme REM, ou… je sais pas, Foutain Of Wayne, Vampire Weekend ça commence à la fac, en l’occurrence celle de musicologie de Columbia. Tout ça m’a l’air parfait pour un groupe un peu trop carré, précieux et cérébral. Eh bien oui, un peu. Les deux premiers albums de Vampire Weekend sont tout sauf bruitistes, jamais plus de 3 ou 4 pistes à la fois, avec des sonorités et des percussions africaines, des rythmes latins, pas très loin du raga… ils nous on fait un peu voyager. C’est tout gentil, tout mignon, et plutot de qualité mais un peu trop sage et policé pour atteindre le très bien. Le groupe a commencé en tournant avec les Shins et ils ont décollé tous seuls comme des grands en fin de décennie. Premier album en 2008, second en 2010, c’était la suite logique, c’était comme sortir dix autres pistes du premier. Et en 2013, c’est Modern Vampires Of The City, un troisième album un peu plus foufou. Et plus sombre, c’était : l’album DE LA MATURITÉ. On écoute Diane Young.
[DIANE YOUNG]
Ce troisième album est plus sombre, plus hanté, bien plus new-yorkais que les deux premiers.
C : Mais voilà, ça fait six ans depuis cette galette, et le groupe était au bout du rouleau. La suite logique, ce serait un album de métal, non ?
B : Curieusement, non, mais on y vient. Ezra Koening a trempé dans des plans particulièrement bizarres, je rappelle qu’il a pondu Neo Yokio sur Netflix, un dessin animé ultra loufoque, je ne saurais jamais dire si c’est involontairement bien ou juste tellement nul que ça en devient bien. Le groupe a perdu Rostam Batmanglij, qui a quitté l’aventure et aujourd’hui on parle donc de Father Of The Bride, le quatrième album, qui ressemble presque à un projet solo.
[HARMONY HALL]
Un album plus apaisé. Un peu trop, je trouve ça un poil inquiétant. Je ne saurais trop jauger l’ironie de cet album, qui démarre sur cette pochette mochissime, qui parodie l’esthétique humanitaire We Love The World. D’ailleurs, en parlant d’esthétique humanitaire nulle, le premier morceau pique cet insupportable sample de Hans Zimmer, lui aussi très utilisé par la publicité. Je vous laisse aller voir ça par vous-même.
C’est beaucoup plus varié, fragmenté, dix-huit pistes pour une heure de galette, avec des caméos réguliers de Danielle Haim, du groupe Haim, y’avait pas de piège. Et on voyage encore plus ! On fait le tour de la mélanésie - LE SAMPLE INTERDIT - mais aussi du japon, à l’amérique latine. Ezra chante ses aventures d’homme blanc apaisé et bien élevé qui s’est installé à Los Angeles, le pauvre.
[UN AUTRE EXTRAIT]
Et il faut aimer ! Ce n’est pas dans le bonheur et le contentement qu’on fait les meilleurs galettes. Mais Father Of The Bride est rempli de petites créations, d’invention, et de polysémies. Mais on arrive dangereusement vers le mainstream, je cite Ezra Koenig cité par Libération.
C : Nous avons profité du hiatus passionnant entre Napster et Spotify, quand certains se sont demandé si l’indie rock était la nouvelle pop. Mais l’empire contre-attaque toujours. Nous avons terminé notre phase de croissance et malgré le respect que j’ai pour la pop mainstream, je dois avouer être heureux de dire que nous n’en faisons pas partie.
B : Certes, mais personnellement, je préfère le Vampire Weekend plus angoissé, c’est là qu’il est à son meilleur. Mais soit, ça reste tout de même de la bonne zique.
C : Father Of The Bride, c’est la quatrième album de Vampire Weekend, c’est du rock indé slash musiques du monde, et c’est disponible partout. Merci Benjamin !
0:00
6:00
Vous êtes sur une page de podcast. En cas de difficulté pour écouter ce document sonore, vous pouvez consulter sa retranscription rapide ci-dessous.