Corentin : Le 12 novembre dernier, L’organisation mondiale de la santé publiait un rapport sur la hausse dangereuse de la consommation d’antibiotiques dans certains pays. Une tendance qui fait craindre à l’OMS, un nombre croissant d’infections insoignables. Que nous dit ce rapport ? Faut-il s’inquiéter, Laura Aupiais ?
Laura : On peut. C’est légitime puisqu’une utilisation abusive d’antibiotiques permet aux bactéries d’apporter une réponse immunitaire contre ceux-ci et ainsi rendre les antibiotiques inefficaces.
Mais ça, je pense que vous le savez déjà. Tout le monde se souvient de la fameuse phrase « Les antibiotiques, c’est pas automatique ».
Corentin : Réaction.
[SON 1 - PUB Antibio extrait]
L : Est-ce que tu te souviens de quand ça date ?
Corentin : Réaction.
L : Et bien, ce slogan publicitaire a aujourd’hui plus de 15 ans, Corentin. Il aura contribué à faire baisser la vente et la consommation d’antibiotiques jusqu’en 2007 où à partir de cette date, on observe une augmentation significative de la consommation d’antibiotiques.
Par conséquent et pour inverser cette tendance, le gouvernement français lance en ce moment une nouvelle campagne de sensibilisation avec un nouveau slogan.
Corentin : Quewah ?
L : Je partage ta tristesse et ton émotion. Donc exit « les antibiotiques c’est pas automatique », place à « les antibiotiques, ils sont précieux, utilisons-les mieux ».
C’est moins percutant mais le message est clair et il répond à la recommandation de l’OMS vis-à-vis des antibiotiques. Car selon cette dernière, la résistance aux antibiotiques constitue aujourd’hui l’une des plus graves menaces qui pèse sur la santé mondiale, la sécurité alimentaire et le développement.
Corentin : Ah oui d’accord. Mais en fait, qu’est-ce concrètement un antibiotique ?
L : Pour résumer, l’antibiotique est une substance naturelle ou synthétique qui détruit ou bloque la croissance des bactéries et les empêche de se reproduire. Elle est produite naturellement par des micro-organismes comme des champignons ou d’autres bactéries.
Et ces dernières d’ailleurs, les produisent pour éliminer les bactéries concurrentes avec lesquelles elles sont en compétition. On a découvert à peu près 10 000 molécules antibiotiques mais toutes ne sont pas compatibles avec notre organisme. L’antibiotique le plus connu est la pénicilline.
Corentin : Pourquoi est-ce grave ?
L : Ce qui est grave c’est l’antibiorésistance des bactéries. Cécile Thibert, journaliste Santé au Figaro nous explique le problème.
[SON 2 - Antibiorésistance -15s]
Ce qu’il faut savoir également, c’est qu’il existe dans l’environnement des bactéries qui résistent naturellement aux antibiotiques et d’autres qui ont la faculté de muter génétiquement afin de leur résister. Celles-ci peuvent également avoir la capacité de partager cette résistance avec les autres.
De ce fait, on observe un nombre croissant d’infections comme la pneumonie, la tuberculose… Voire la septicémie ; qui est une infection généralisée qui se propage dans le sang.
Il y a aussi une forte augmentation de la gonorrhée, qu’on appelle plus familièrement la chaude-pisse, et tout ce qui va être du ressort des maladies d’origine alimentaires.
Corentin : Ca serait dû à la sur-consommation ?
L : Oui pas seulement. La sous-consommation est aussi pointée du doigt par l’OMS. La résistance des bactéries aux antibiotiques peut survenir quand le malade n’a pas les moyens de se payer un traitement complet ou lorsqu’ils ont accès qu’à des médicaments de qualité inférieure ou frelatés.
Car cela donne une chance à la bactérie de survivre et de développer une immunité. Il en est de même quand on ne va pas au bout de son traitement.
Corentin : Quels sont les pays où l’on consomme le plus et le moins d’antibiotiques ?
L : Avant de répondre à ta question, il faut savoir que l’OMS définit la consommation d’antibiotiques en dose définie journalière ou DDJ pour 1000 habitants. C’est-à-dire que ne sont comptabilisées que les doses prescrites par les médecins. Ne rentre pas dans le tableau l’auto-médication car difficile à quantifier, vous vous en doutez.
Alors le pays qui consomme le moins d’antibiotiques, c’est le Burundi. Et le pays qui consomme le plus, ce n’est pas celui auquel vous pensez…
Corentin : …?
L : Il s’agit de la Mongolie avec 64 DDJ. Pour vous donner une idée, il y a 11 millions d’habitants au Burundi et seulement 3 millions en Mongolie.
Corentin : Et en France ?
L : En France, c’était 18 DDJ.
A noter que l’OMS se base sur les données de 2015 collectées dans 65 pays et régions. N’y figurent pas : les Etats-Unis, la Chine et l’Inde.
Corentin : Que peut-on faire à notre échelle ? Nous citoyen lambda.
L : L’OMS a publié une brochure où il recommande de se laver correctement les mains, de faire attention à l’hygiène lors de la préparation des repas, de limiter les contacts rapprochés avec d’autres personnes lorsqu’on est malade, de se protéger lors de rapports sexuels, et d’avoir ses vaccins à jour.
Corentin : Et toutes ces mesures peuvent endiguer la résistance des bactéries aux antibiotiques ?
L : Selon l’OMS, cela va permettre de ralentir le développement et la propagation de la résistance des bactéries pour que les antibiotiques dont nous disposons continuent à être efficaces le plus longtemps possible.
Et parallèlement à ces recommandations de l’OMS, tout récemment le gouvernement a annoncé le déblocage de 40 millions d’euros supplémentaires dans la recherche sur les nouveaux antibiotiques capables de lutter contre les « superbactéries » ultra-résistantes.
Corentin : Eh bien si cette chronique n’est pas le moyen de sensibilisation ultime, je ne sais pas ce qu’il faut ! Merci Laura ! Et à très vite !
Antibiotiques de moins en moins efficaces : quand les microbes font de la résistance
C’est un fait, les antibiotiques sont de moins en moins efficaces contre les bactéries. En effet, ces dernières sont désormais mieux armées pour lutter contre nos traitements et le risque d’apparition d’un supermicrobe impossible à soigner commence à inquiéter le monde médical. Voyons de quoi il en retourne avec Laura Aupiais.
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