Corentin : Alors que Jurrasic World 2 sort (où est sorti en fonction du moment où vous écouterez cette chronique) le [date] sur les écrans, le film relance la question, que dis-je, le fantasme : Peut-on aujourd’hui avec les méthodes actuelles construire un parc d’attraction avec des dinosaures dedans ? Si on retrouve un moustique emprisonné dans de l’ambre…? Laura Aupiais va peut-être nous dire... oui ?
L : Et bien...euh...c’est compliqué. Est-ce que je tue le mythe tout de suite ou on attend un peu ?
Corentin : Attends peut-être un peu.
L : Très bien. Alors, oui c’est possible.
[BANDE ANNONCE JURASSIC PARK 0’03> 0’21]
Imaginons, on retrouve un moustique emprisonné dans de l’ambre ou même une tique ! On en a retrouvé 4 spécimens vieux de 99 millions d’années en Birmanie l’année dernière. Et un de ces derniers est gorgé de sang.
Attends, j’ai mieux, toujours en Birmanie et toujours dans de l’ambre, on a retrouvé il y a deux ans une queue de dinosaure à plumes avec sa peau, ses muscles et ses ligaments !
Corentin : Ah ! Excellente nouvelle !
L : Mais oui que faisons-nous ! Est-ce qu’on peut extraire l’ADN de ce dinosaure et le cloner ? Mais tout à fait ! Bon, on aurait malheureusement qu’une seule espèce d’un seul sexe...….
Si l’ADN pouvait se conserver pendant des millions d’années…
Corentin : Ah. On avait dit qu’on attendait un peu.
L : Déso pas déso. Et oui, c’est le problème majeur. Pour cloner un dinosaure, il faudrait une cellule vivante. Or, l’ambre ne préserve pas autant que ça les éléments emprisonnés à l’intérieur.
Corentin : Alors le problème, ça serait l’ambre.
L : Je dirai que ça serait le temps qui passe tout simplement. Il se trouve que l’ADN se détériore très rapidement après le décès. Même dans un organisme encore en vie, l’ADN peut subir des attaques qui l’endommage. C’est généralement sans conséquences car l’organisme est doté d’un grand nombre d’enzymes dont le rôle est de réparer l’ADN.
En revanche, dès que l’ADN est livré à lui-même sous entendu en dehors d’un environnement cellulaire normal, autrement dit à la mort de l’animal, les agressions chimiques ou enzymatiques sont encore plus nombreuses et comme il est mort, les réparateurs enzymatiques ne sont plus présents.
Parallèlement à ça s’ajoute les conditions environnementales (température, pH, humidité) qui peuvent dégrader rapidement l’ADN. Et je ne te parle même pas de la tête de l’ADN dans un estomac d’insecte comme c’est le cas dans jurassic park.
Corentin : Et si malgré tout, on arrive à retrouver quelque chose ?
L : Ca ne sera quand même pas assez pour cloner un animal. Car ça serait comme une infime partie des planches et des vis d’un meuble qu’on doit construire sans plan.
Corentin : D’accord…
L : Si je prends un autre exemple. Si on prend le Mammouth laineux, cet ancêtre de l’éléphant qui a disparu il y a 5000 ans. Souvenez-vous, on a trouvé un spécimen emprisonné dans la glace en Sibérie, il y a quelques années. Et là vous vous dîtes peut-être qu’alors avec le Mammouth c’est possible. Ca fait moins longtemps qu’ils n’existent plus.
C’est ce qu’avancait George Church de l’université de Harvard, lors d’un meeting de l’Association américaine pour l’avancée des sciences au début de l’année dernière. Il ne veut pas le cloner mais le scientifique souhaite implanter quelques gènes de Mammouth laineux dans l’ADN d’un éléphant d’Asie dans l’espoir de créer une autre espèce avec des poils, moins sensible au froid etc.
Corentin : Pas con le gars, ce sont des cousins éloignés. Ils doivent avoir des gènes en commun.
L : Cette perspective est intéressante puisqu’on connaît le génome du mammouth laineux et CRISPR CAS 9.
Corentin : Donc il y est parvenu ?
L : Patience. L’avenir nous le dira. L’équipe de chercheurs menée par George Church affirme avoir réussi à implanter 45 séquences d’ADN dans le noyau d’une cellule d’éléphant. C’est loin de suffire parce que les deux espèces possèdent des milliers de gènes complètement différents.
De plus, il faut ensuite procéder à cette technique sur un ovocyte. Il faut que cet ovocyte devienne un embryon. Et il est hors de question de l’implanter dans une femelle éléphant d’Asie car l’espèce est en danger et cela peut présenter d’énormes risques pour la femelle.
Donc il faudrait développer l’embryon dans un environnement artificiel. Une sorte d’utérus reconstitué.
Corentin : On sait faire ça ?
L : On a réussi à maintenir en vie des embryons de souris pendant quelques jours mais pas jusqu’à l’aboutissement d’une naissance…Pour information, la gestation d’un éléphant est de 22 mois…
Corentin : A cela s’ajoute, les potentielles anomalies génétiques mais revenons en à nos dinosaures..
L : Je voulais raconter cet exemple pour que vous vous rendiez compte de la difficulté de la tâche.
Pour résumer, si on veut recréer un dinosaure vivant, l’intégralité de l’ADN de l’animal est absolument nécessaire.
Quand bien même on retrouve des morceaux d’ADN, on ne saura pas comment les agencer les uns avec les autres pour former une séquence cohérente et surtout correcte.
On se retrouverait un peu comme avec un puzzle dont toutes les pièces sont emboîtables : on peut les assembler, mais l’on ne saura jamais si c’était comme cela à l’origine... à moins de s’inspirer de l’ADN d’animaux proches dont on connaît la séquence.
Corentin : Il faut voir du côté des oiseaux…
L : Le problème c’est que plus de 60 millions d’années les sépare.
Ceci dit, dans le documentaire “Jurassic Park : quand la fiction devient réalité”, des chercheurs y voient un potentiel. Tom Stubberfield, le réalisateur du documentaire avait alors interrogé le professeur Hans Larsson à ce sujet
[SON DOCUMENTAIRE 35’04 > 35’40 ]
L : Notre seule chance serait de mélanger au hasard les deux ADN et de le mettre dans un oeuf de poule et de voir ce qu’il en sort. M’enfin bon On a plus de chances de croiser un extra-terrestre qu’un dinosaure…
C : Bon eh bien je n’ai plus qu’à rappeler mon fournisseur et annuler les produits dérivés de mon super parc. Merci en tout cas pour toutes ces précisions, et à bientôt.
Cloner des dinosaures, est-ce possible ?
Est-il possible de recréer un parc rempli de dinosaures, avec la même méthode que dans le film « Jurassic Park » ? Vous savez ? Grâce à un moustique gorgé de sang retrouvé préservé dans de l’ambre ? Avec Laura Aupiais, on essayera de voir pourquoi cette solution si séduisante sur le papier présente également de nombreux problèmes.
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