Corentin : Les lunes peuvent-elles avoir... des lunes ? C’est la question que se sont posée deux chercheurs de l’université de Bordeaux et du Carnegie Observatories de Pasadena aux États-Unis. Leur existence théorique est possible mais avec des conditions très particulières. Et c’est ce que nous allons voir avec Laura Aupiais. Bonjour Laura…
L : Bonjour Corentin, bonjour à tous. Vous connaissez comment fonctionne l’univers. Autour des étoiles orbitent le plus souvent des planètes, et autour de ces planètes orbitent parfois des satellites naturels, comme notre bonne vieille lune. Mais est-ce que des lunes peuvent orbiter autour d’autres lunes ?
C’est aussi la question que s’est vue posée Juna Kollmeier par son propre fils. Elle a donc décidé avec l’aide de Sean Raymond de voir si c’était possible.
Même si pour le moment, on n’a pas jamais observé de tels phénomènes, que ce soit dans notre système solaire ou ailleurs.
Corentin : Ce qui explique l’absence de nom officiel pour ces lunes de lunes ou moonmoons.
L : Absolument. Ils proposent toutefois de les appeler submoons ou sous-lunes en français.
Les deux chercheurs ont élaboré des calculs qui rendrait potentiellement possibles l’existence de ces lunes de lunes.
Corentin : Pourquoi ne les a t-on jamais observé ?
L : Tout d’abord dans les travaux qu’ils ont publié sur arxiv.org, les chercheurs nous disent que deux possibilités existent pour expliquer le fait qu’on en ait jamais vu.
Intrinsèquement, la formation d’une sous lune est particulièrement improbable. Et deuxièmement, c’est que les corps sont dynamiquement instables et qu’ils sont rapidement éjectés du système après leur formation.
Corentin : D’accord. Mais comment se forme une lune ?
L : Un satellite peut se former généralement de trois manières.
Première façon, par capture. Il faut que deux astéroïdes gravitent l’un près de l’autre et s’approchent suffisamment d’une planète pour que son champ gravitationnel ne soit pas négligeable.
Dès lors, l’astéroïde le plus proche ou le plus lourd de la planète se retrouve happé dans le champ gravitationnel de cette dernière. Sa trajectoire est alors modifiée par la force de l’attraction de l’astre et s’ajoute à cela d’autres forces comme l’inertie, l’attraction de l’autre astéroïde, etc.
Corentin : Que devient le deuxième ?
L : Le deuxième a perdu son “combat” et part faire sa vie dans l’espace.
Deuxième façon, c’est par collision ou impact. Il faut qu’un astéroïde de taille monstrueuse heurte une planète.
Et lors de ce choc, un panache de matière jaillit de l’impact, contenant roche et parfois même des fragments du noyau de la planète. Cette matière va s’agglomérer et former un nouveau corps. Et ce dernier pourra commencer sa rotation.
Et c’est d’ailleurs l’une des théories les plus probables pour la formation de notre lune.
Corentin : Et la dernière manière ?
L : La dernière manière est l’une des dernières étapes de ce que je viens de dire, en fait. C’est ce qu’on appelle l’accrétion. Je vous laisse écouter un extrait du documentaire intitulé Les mystères de l’univers de Geof Miller pour A&E Television Networks et diffusé sur RMC découverte.
[SON 1 - Documentaire les mystères de l’univers RMC Découverte- 30s]
Corentin : Revenons à notre premier sujet : les submoons. Quelles sont les conditions à réunir pour les observer ?
L : Je vais parler de lune et sous-lune pour que ça soit plus clair pour tout le monde. Vous le savez, dans notre système solaire, les lunes sont bien trop proches de leur planète-mère pour abriter des sous-lunes.
Car la sous-lune doit se trouver à bonne distance de la planète mère pour ne pas être piégée par la force de gravitation et se retrouver à graviter autour d’elle.
Ensuite, elle devrait en revanche être assez proche de cette lune, pour être rattachée à son champ de gravité.
Corentin : D’où viendrait cette sous-lune ? J’imagine qu’elle n’apparait pas par enchantement quand les conditions sont réunies.
L : Effectivement. A priori, la sous-lune se formerait par collision. Mais il faut que suite à cet impact, un morceau de roche soit arraché à la lune selon une vitesse et un angle bien déterminés.
Mais, malheureusement, l’équilibre d’un tel système serait dans tous les cas fragile et sa durée de vie relativement brève puisque l’orbite d’une lune change au cours du temps.
Néanmoins, Sean Raymond et Juna Kollmeier pensent que si des sous-lunes d’environ 10 km de diamètre gravitent autour de lunes de quelques milliers de kilomètres de large qui orbitent elles-mêmes à une bonne distance de leurs planètes, le système pourrait perdurer.
Corentin : Est-ce un scénario ayant déjà existé dans notre système solaire ?
L : Attention, gros conditionnel sur ce qui va suivre. Selon les deux astronomes, quatre lunes en auraient abritées au cours de leur histoire : Titan et Japet, qui gravitent autour de Saturne, Callisto, deuxième plus gros satellite de Jupiter et enfin la quatrième serait notre satellite naturel !
Mais ceci dit, Il y aurait une candidate parfaite pour abriter une sous-lune c’est une exolune nommée Kepler 1625b 1. Elle a la taille de Neptune et orbiterait autour d’une géante gazeuse dix fois plus massive que Jupiter, à 8000 années-lumière de la Terre.
Ce qu’il faut surtout retenir c’est que c’est mathématiquement possible.
Corentin : Eh bien j’espère qu’on finira par observer une de ces lunes qui a décroché la lune, justement. Merci Laura et à très vite !
« Moonmoon » : les satellites naturels pourraient bien décrocher la lune
Imaginez que notre bonne vieille Lune qui tourne autour de la Terre ait elle-même un satellite naturel. Deux chercheurs ont réfléchi à cette idée. Ils appellent ça une « moonmoon » et si on n’en a encore jamais observé, ils ont prouvé que c’était théoriquement possible. Explications avec Laura Aupiais.
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