Corentin : Aujourd’hui, Pierre-Alexandre Rouillon de Gamekult a lâché ses manettes pour s’affaler devant Netflix. Bonjour Pierre-Alexandre !
Pierre-Alexandre : Salut Corentin !
C’est vrai que le week-end dernier j’ai dévoré des paquets de bonbons devant une série plutôt cool mais d’abord, on va remonter dans le temps.
C : Ok Pipo, monte dans la DeLorean !
P : Oui non calme-toi, c’est pas aujourd’hui qu’on va tuer bébé Hitler, je voulais juste remonter quelques mois en arrière, quand on avait parlé de Run the Jewels.
C : Ah oui je me souviens ! C’était ton duo de rap vachement bien qui filent leurs albums gratuitement, c’est ça ?
P : Très belle mémoire mon cher Corentin ! C’est en effet un duo dont l’un des membres, Killer Mike, est un militant afro-américain qui, malgré quelques positions crispantes (notamment sur le droit du port d’armes), se bat pour des causes justes de progressisme et de justice sociale.
Et ce bon Mike, et ben il a maintenant sa série sur Netflix, qui s’appelle Trigger Warning With Killer Mike.
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En gros, durant une courte saison de six épisodes d’une petite demi-heure, Killer Mike va analyser diverses obsessions américaines à travers le prisme de la communauté noire-américaine. Drogue, éducation, pauvreté, gangs… la plupart des sujets y passent.
C : D’accord, mais du coup c’est une série documentaire ?
P : Mhhhh, à choisir je te dirais oui, mais en allant quand même vers les plates-bandes de Michael Moore. En prenant parfois des positions grotesques ou radicales, Killer Mike va mettre en lumière quelques dysfonctionnements de la société américaine, voire de la société tout court.
C : Bon alors là je veux bien quelques exemples, quand même.
P : Ben pour commencer, je te parlerais bien du premier épisode, qui part d’une enquête socio-économique très intéressante (mais dont je n’assure pas la validité) sur la durée de vie d’un dollar dans une communauté précise en Amérique.
C : La durée de vie ? C’est à dire ?
P : Et ben on apprend par exemple qu’un dollar qui entre dans les caisses d’un restaurant ou d’une boutique asiatique va attendre 26 jours avant de repasser entre les mains d’une autre communauté.
C : Ah ok je comprends mieux !
P : Et dans le premier épisode de Trigger Warning on apprend donc qu’un dollar reste 26 jours dans la communauté asiatique avant d’en ressortir, 17 jours dans la communauté juive et seulement six heures dans la communauté noire.
En partant de ce constat, Killer Mike décide de passer trois jours en ne consommant que dans des commerces noirs. Et très vite, il réalise que c’est impossible de bouffer, boire ou, pire pour lui, fumer de l’herbe sans sortir de ce qu’il appelle la “black economy”.
Et l’épisode entier s’intéresse donc à des artisans et propriétaires noirs-américains, en essayant de comprendre comment faire fructifier l’économie de la communauté noire américaine.
C : Ah ouais c’est super intéressant !
P : D’ailleurs, il finit ce premier épisode sur une note très mignonne où il dit “Bon, il y a un Black Friday mais il est tout pourri. Alors on va instaurer l’autre black friday où, chaque vendredi, vous essayez de financer au moins un commerce ou artisanat tenu par une personne noire”.
En gros, du militantisme drôle et tendre, aidé par la bonhomie naturelle de Killer Mike.
C : Ok je comprends mieux. Et tu aurais d’autres exemples de sujets traîtés par la série ?
P : Ah ben j’ai un amour tout particulier pour l’épisode sur la religion où, agacé que son Messie soit blanc, Killer Mike décide de lancer une nouvelle religion basée sur un pote à lui qu’il surnomme “Sommeil” parce qu’il a tout le temps l’air endormi.
Du coup, il crée l’église du sommeil et fait son premier prêche dans un strip club fermé, où il fait dormir sa demi-douzaine de fidèles. Donc oui, hein, ça sent parfois plus le documenteur que le documentaire, mais c’est fait avec une tendresse et une intelligence brutes qui m’ont touché au coeur.
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Donc voilà pourquoi j’évoquais Michael Moore. Avec cette espèce de journalisme militant qui va parfois jusqu’à l’absurde pour démontrer des choses très simples, Trigger Warning with Killer Mike met en lumière des faits plutôt intéressants, qui peuvent parfois nous passer au dessus du crâne.
C : Et bien merci beaucoup Pierre-Alexandre ! Trigger Warning with Killer Mike, c’est six épisodes, et c’est disponible sur Netflix !
« Trigger Warning with Killer Mike » : double détente
Plutôt connu pour ses performances dans le rap aux États-Unis, Killer Mike a décidé de délaisser temporairement la scène pour les caméras. Dans « Trigger Warning with Killer Mike », l’artiste s’empare de sujets de justice sociale liés à la communauté noire. Pas toujours parfaitement pertinent, mais souvent très drôle, c’est Pierre-Alexandre Rouillon de « Gamekult » qui nous parle de cette démarche pleine d’énergie.
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