Djamel Dib n’avait pas très envie de tout re-raconter encore une fois. Cet animateur sportif de 34 ans, salarié de la ville d’Aulnay-sous-Bois, accuse des policiers de la BAC de l’avoir agressé le 30 janvier, trois jours avant l’interpellation violente de Théo L. et dans le même quartier. Cet après-midi-là, sur le trajet de la crèche, Djamel Dib bloque involontairement le passage d’une voiture banalisée, lancée à la poursuite d’une autre. Il ne comprend pas tout de suite que les types furieux qui lui crient « bouge de là, fils de pute ! » sont policiers. Les agents descendent de voiture, lui aussi. Un policier le pousse, un autre l’étrangle « pendant une trentaine de secondes », avant qu’une « balayette » ne le fasse tomber lourdement par terre où il est menacé d’un Taser « à dix centimètres de la tempe ». Menottes, petit tour dans la voiture de police. Djamel Dib aurait été relâché après avoir expliqué qu’il connaissait le maire, sans autre forme de procès. Son médecin lui prescrit cinq jours d’ITT. Le commissariat d’Aulnay-sous-Bois et celui de Villepinte refusent de prendre sa plainte.
Libération révèle l’affaire en une, le 22 février. Le parquet de Bobigny ouvre une enquête dans la foulée. La première fois qu’on a Djamel Dib au téléphone, le jour même, il sort tout juste des locaux de l’IGPN (la « police des polices »), dans le XIIe arrondissement de Paris, où il a enfin réussi à porter plainte. L’accueil lui a semblé « un peu froid mais correct ».