Mis en place dans les mairies lors de la crise des gilets jaunes, les cahiers de doléances sont désormais loin des regards, dans les archives départementales. Coups de gueule, idées, encouragements : les citoyens y interpellent Emmanuel Macron. Cet été, tous les midis, « Les Jours » vous en partagent un extrait, brut.
«Àl’âge de 5 ans, j’ai appris que j’étais gravement dyslexique. Venant d’un milieu aisé, j’ai eu la chance à l’âge de 14 ans de pouvoir partir en pension en Angleterre où le système était adapté pour les gens comme moi. Cette chance, 99 % des dyslexiques ne l’ont pas. C’est donc pour ça que je vous écris, à la main et sans correction. Les handicapés physiques ont des soutiens et des aides. Je n’ai jamais eu d’aide dans le système français que ce soit en école primaire ou au collège public comme privé. Le professeur se moquait de moi. En Angleterre, quand je passais des examens, j’avais le droit d’être dans une salle seul et de dicter à un professeur ce que je voulais écrire. Je trouve ça dommage que dans un pays développé comme le nôtre, j’ai dû partir car on ne pouvait pas m’aider.
J’ai aujourd’hui 23 ans, j’habite à New York où je suis rentré dans une très bonne école. Dans mon université, je suis considéré comme un handicapé. Si j’étais resté en France, je n’aurais jamais eu l’opportunité de choisir une filière qui me corresponde et probablement je n’aurais jamais eu le baccalauréat et le brevet.
Pour illustrer mon propos, je vous propose comme solution de reconnaître la dyslexie comme un handicap qui a besoin de soutien et d’aide dès le plus jeune âge. Je vous propose aussi pour les dyslexiques qui rentrent dans la vie active un système de tampon reconnu par le gouvernement qui indiquerait que la personne est dyslexique. Sur les emails, par exemple, ce qui permettra à la personne qui lit de savoir que ce n’est pas un enfant de 10 ans qui écrit mais une personne dyslexique.
Le système et les mesures comme les structures mises en place en Angleterre permettent à l’élève dyslexique d’évoluer de la même manière que tous les autres élèves. On m’a donné ma chance en Angleterre qu’on m’a refusé en France. J’espère que mes propositions seront d’une aide. Je sais que vous avez probablement des choses et des sujets plus importants. Cette lettre, je l’ai écrite en août et je vous l’ai envoyée en septembre. J’ai lu un article dans L’Obs. Je n’ai pas eu de réponse donc je profite de ce grand débat pour vous en parler.
J’espère que dans quelques années, je pourrai rentrer en France, être accepté pour qui je suis et être considéré comme handicapé dyslexique.
Je vous pris d’agréer, Monsieur le Président, l’expression de mes salutations respectives.
Paris, le 15 janvier 2019 »