En politique, difficile de « rappeler le produit ». Très difficile. Confrontées à des accidents industriels, les entreprises sont contraintes de retirer des modèles défectueux du marché. C’est le premier acte fort d’une communication qui vise à enrayer le plus rapidement possible une crise, en particulier médiatique. Le retrait de François Fillon, lui, a été écarté. Dix jours après les premières révélations du Canard enchaîné sur l’embauche de sa femme comme assistante parlementaire, le candidat a organisé une opération « de transparence » pour pouvoir poursuivre sa campagne, lors d’une conférence de presse à son QG de campagne lundi 6 février. Il a essayé d’effacer l’hypothèse d’un plan B, qualifié de « plan Bérézina », et a présenté ses excuses aux Français. Une opération de la dernière chance après deux semaines d’une communication de crise très mal maîtrisée. Depuis les premières heures de l’affaire, François Fillon s’est montré incapable d’appliquer les quelques règles de base de la communication de crise. Sa conseillère, Anne Méaux, en est pourtant l’une des grandes spécialiste (lire l’épisode 1, « Scène de déminage »). Nous avons demandé à des communicants ayant travaillé sur de gros scandales d’entreprise d’analyser les failles de la riposte de l’équipe Fillon.
On se souvient que dans la crise des moteurs diesels truqués, fin 2015, Volkswagen avait mis du temps avant de réagir aux révélations de la presse allemande, qui se sont ensuite succédé et ont aggravé la crise, jusqu’à la démission du PDG, Martin Winterkorn. « Les communicants de François Fillon ont visiblement été pris de court. Mais ils ont aussi sous-estimé l’impact que l’affaire pouvait avoir dans l’opinion », estime Arnaud Dupui-Castérès, président de l’agence Vae Solis, qui a notamment géré la communication de crise du cardinal Barbarin, accusé d’avoir couvert des crimes pédophiles, ou celle de Biotrial, société impliquée dans la mort d’un patient lors d’un essai clinique à Rennes début 2016.

L’opération « déminage » par le candidat lui-même a été tardive. Sa première prise de parole au journal de 20 heures de TF1, pour s’expliquer, intervient deux jours après les premières fuites sur les révélations de l’hebdomadaire – d’autant plus tard que le palmipède appelle en général les personnes concernées avant publication. Un vrai retard à l’allumage qui a laissé les médias commenter et les porte-parole dérouler des argumentaires mal coordonnés.