«Parce que c’est notre projeeeet ! » La phrase est désormais célèbre. Et plus encore la façon dont Emmanuel Macron l’a hurlée, les bras ouverts, dans une posture quasi-christique, le 10 décembre 2016, lors de son meeting de la porte de Versailles, devant plus de 10 000 personnes chauffées à blanc. Elle a depuis fait l’objet de nombreux détournements humoristiques sur les réseaux sociaux. Trois mois plus tard, nous y sommes : Emmanuel Macron a bel et bien un projet, présenté jeudi matin à la presse. Sa communication, qui a longtemps oscillé entre surexposition et discours incantatoires, sans prises de position fortes, a laissé la possibilité à ses détracteurs, au fil du temps, d’installer la petite musique du « candidat sans programme ».
On se souvient d’un François Fillon, pas encore empêtré dans ses ennuis judiciaires qui, pour sa rentrée politique le 3 janvier sur le plateau du journal de 20 heures de TF1, avait déjà persiflé : « Quand Emmanuel Macron aura un programme, je le commenterai. Pour l’instant, je n’ai rien vu. » Les médias aussi, qui lui ont accordé une large couverture, ont fini par émettre des doutes et, ces dernières semaines, se sont beaucoup interrogés : « Emmanuel Macron a-t-il vraiment un programme ? » D’autant que des esquisses de propositions présentées dans son livre, Révolution, sorti en novembre 2016 (XO Éditions), demandaient à être précisées ou ont été, depuis, parfois contredites. Le grand oral d’Emmanuel Macron sur son programme, à moins de deux mois du premier tour, était très attendu.
Jeudi matin, son équipe de communication a donc soigné le décor. Près de 400 journalistes s’étaient accrédités pour assister à la conférence de presse, dans l’antre cossu du Pavillon Gabriel, situé à quelques mètres des jardins de l’Élysée. De l’importance des symboles : dans son entreprise de « conquête », comme il l’appelle, Emmanuel Macron se rapprochait déjà un peu, géographiquement, de l’objectif final. Loin de son QG impersonnel du XVe arrondissement de Paris, le pavillon accueille d’habitude des mariages ou des séminaires. On y tourne aussi des émissions de télévision, historiquement celles de Michel Drucker ou plus récemment celle présentée par Laurent Ruquier, On n’est pas couché, sur France 2 – où Emmanuel Macron a jusqu’à présent refusé de se rendre. Mais sur scène, l’ambiance n’était pas au show télé. Le candidat a préféré un ton sobre, solennel parfois.