Émilie est auxiliaire de vie en Vendée. Tous les jours en temps normal, elle visite une dizaine de personnes pour les aider à se lever, se coucher, faire le ménage ou leur toilette. C’est un métier difficile où le temps manque toujours, mais aussi un métier humain qui permet à des personnes âgées qui sont encore en partie autonomes de rester vivre chez elles aussi longtemps que possible. Depuis le début de la crise du coronavirus, tout a changé comme partout, et les consignes sont strictes pour éviter de contaminer ces personnes fragiles. Mais encore faudrait-il avoir assez de masques…
«Officiellement, on doit porter un masque quand on est à moins d’un mètre de la personne, et aussi si on a des symptômes. Mais dans les faits, on est à court comme partout et on sait qu’on ne respecte pas les consignes. Par exemple, on doit jeter le masque après une toilette, mais on le garde toute la matinée parce qu’on nous les donne vraiment au compte-gouttes. Je vois sept à dix personnes par jour et je n’ai jamais assez de masques. On se lave les mains, on met du gel hydroalcoolique, on porte des gants ; on nous a aussi demandé de nettoyer le volant et les poignées de nos voitures entre chaque personne. Mais on sait que tout ça, c’est vraiment un pis-aller si on n’a pas de masque. Quand on voit ce qu’il se passe dans les hôpitaux, on sait qu’on n’en aura pas plus, même si mon entreprise essaie d’interpeller. Nous, on est tout en bas de l’échelle des soignantes. D’ailleurs, on n’est même pas des soignantes officiellement, alors…
Dans mon métier, il y a 98 % de femmes, donc des collègues ont pris des arrêts pour s’occuper de leurs enfants et je le comprends. Il a fallu réorganiser les interventions. On nous demande de travailler un peu plus, on absorbe le travail de nos collègues. Mon entreprise a notamment décidé d’espacer les ménages, qui représentent une bonne partie de nos plannings, toutes les deux ou trois semaines, pour pouvoir assurer toutes les toilettes et les aides au lever ou au coucher. Mais c’est difficile, parce qu’on essaye de tisser des liens avec les personnes chez qui on va et là, elles voient arriver de nouvelles personnes. Certains n’aiment pas ça du tout, mais ils comprennent que la situation est exceptionnelle. Les visites ont aussi été réduites au minimum : les infirmières, les aides-soignantes, nous. Les familles ne viennent plus normalement, sauf pour quelques personnes, mais elles ont ralenti leurs visites.