C’est l’histoire d’un long dimanche de confinement. Comme l’impression d’être tombée sur un mot compte triple dans le Scrabble de l’existence : la lenteur d’une après-midi qui s’étire sans avoir rien à faire, un dimanche, le confinement. Je suis seule chez moi, mon colocataire est parti se réfugier chez sa compagne. Alors j’ai fait ce que tout le monde aurait fait à ma place. J’ai saisi mon téléphone, et j’ai retéléchargé Tinder. Journaliste spécialisée amour et réseaux sociaux, j’ai publié en mars 2019 L’Amour sous algorithme, une enquête sur les applications de rencontres et leurs conséquences néfastes sur nous. Je n’avais pas touché aux applis depuis. Mais là, il me semblait que les choses pourraient se passer différemment. J’étais loin d’être la seule : ce dimanche 29 mars, quelques semaines après le début du confinement, l’application leader de dating affirmait enregistrer son record mondial de swipes jamais atteint.
Une grand majorité des sites et applications de rencontres ont enregistré une hausse de leur taux d’activité pendant le confinement : plus 30 % pour Tinder, 20 % sur OkCupid, 40 et 25 % respectivement pour les françaises Once et Fruitz. L’idée de se rendre sur un service de dating pendant le confinement peut paraître paradoxal, mais elle ne l’est pas tant que ça : « Avoir quelqu’un avec qui échanger, flirter, qui prend de vos nouvelles peut rendre la période bien plus joyeuse », explique aux Jours Clémentine Lalande, PDG de Once, application française de rencontres. De mon côté, alors que je sélectionne de nouvelles photos pour actualiser mon profil, je me réjouis. C’est sûrement le moment idéal pour se connecter. Puisqu’on ne peut pas voir les gens, les gros relous vont se calmer, non ? Moins de risque de recevoir des messages du genre : « Tu fais quoi, allez viens, je t’envoie un Uber, pourquoi tu réponds pas, allez, oh t’es pas drôle, je croyais que tu étais marrante… » Non ?
Grâce au confinement, le ton des messages échangés sur les plateformes serait en effet différent, affirme dans la presse américaine Hesam Hosseini, le PDG de Match, leader du marché, qui possède notamment Tinder, Meetic et OkCupid. Il qualifie les interactions des utilisateurs de « plus profondes ». Une responsable d’OKCupid a même publié un billet de blog se félicitant : « La romance est de retour ». Rien que ça !
Autour de moi, je recueille en effet des dizaines de témoignages de « corona-romances ».