C’est l’histoire de deux cœurs qui pulsent à 100 à l’heure. De paires de jambes qui menacent de se dérober. De mains moites qui parviennent cependant à toquer à la chambre 807 d’un hôtel pas terrible du nord de Paris. La porte s’ouvre. Dani Kristanadjaja apparaît, sourcils larges, visage rond, nez plat, peau mate, 1 m 65 à la toise. Les deux cœurs s’apaisent. Les frères Gwen et Gurvan sont face à leur père, qu’ils n’ont pas vu depuis quinze ans. La scène se déroule le 4 septembre 2010. Une date mémorable. Dani l’Indonésien s’est fait la belle un 4 septembre 1995, laissant en rade à Brest ses garçons de 6 et 4 ans aux bons soins de leur mère et de leur grand-mère maternelle.
L’aîné, Gwen, alors 21 ans, reconnaît d’emblée son père : « Il était juste un peu plus joufflu avec un petit ventre. Et je me souvenais de son rictus au coin de la bouche. » Gurvan lui aussi sait que c’est bien lui avec « une intuition animale ». Les deux gaillards qui regardent désormais le monde du haut de leur 1 m 80 ont cent fois imaginé ces retrouvailles. Mais ce jour-là, ils ne reçoivent que deux tapes dans le dos. « C’était d’une banalité…, souffle Gurvan. Pas d’émotion, pas d’effusion. » Rien. Le jeune homme qui redoutait de s’effondrer en larmes reste droit face à ce paternel qui reçoit ses enfants dans un short de pyjama « hideux ».