Chicago, envoyée spéciale
À Chicago, fief démocrate, la possible victoire du républicain Donald Trump à l’élection présidentielle de ce 8 novembre donne des frissons. Les habitants de Hyde Park, le quartier d’Obama, que je suis depuis plusieurs semaines pour Les Jours, ont « peur ». Cela n’a rien de théorique, c’est palpable, physique. Au niveau national, le scrutin s’annonce plus serré qu’ils n’imaginaient et va se jouer dans quelques États. Certains surveillent les sondages dont les courbes – rouge pour le républicain, bleue pour la démocrate – ont tendance à se rapprocher dangereusement. Beaucoup évoquent le Brexit, comme si les pulsions populistes se faisaient écho.
Le spectre de Trump s’incruste même dans des moments d’insouciance. Ce sont quelques mots échangés au-dessus d’une assiette en carton au « concours du meilleur gâteau » du quartier (qui finance des programmes de nourriture gratuite à Hyde park) où j’accompagne Joy et Michael. On est en plein folklore américain, paisible et inoffensif : un chanteur gratte sa guitare (sauf que les paroles sont des pamphlets anti-Trump), des adultes goûtent des gâteaux dégoulinants de crème et de fruits, un bébé bave sur l’épaule de sa mère. Joy lâche, entre deux bouchées sucrées : « Je suis dans le déni, mais je suis inquiète. » Pas la peine de mentionner Trump, cela suffit. Tout le monde autour de la table sait de quoi elle parle.
Pour la mère de Michael, Martha, la candidature de Donald Trump était une blague.