La Cour de cassation a définitivement confirmé ce mardi que l’affaire de Tarnac ne relevait plus du terrorisme. Ce dossier judiciaire s’éternise depuis plus de huit ans : des crochets posés sur des voies SNCF, imputés à un « groupe de Tarnac » cherchant à déstabiliser l’État. Dans cette affaire, dix personnes, dont Julien Coupat, ont d’abord été mises en examen pour « association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste » après une vague d’arrestations à grand spectacle, en novembre 2008, dans le village corrézien de 300 habitants. Âgés de 22 à 34 ans, les interpellés partageaient un mode de vie communautaire fondée sur une philosophie politique plutôt érudite, issue de divers courants révolutionnaires. Cinq d’entre eux ont goûté à la détention provisoire, avant d’être libérés sous contrôle judiciaire comme leurs camarades. Sans jamais reconnaître leur participation aux sabotages, ils ont contesté les éléments à charge point par point, tout en attaquant en parallèle les fondements politiques de l’antiterrorisme à travers des interviews et des tribunes.
Pour ceux qui gardent un souvenir de l’affaire, Tarnac est devenu le symbole d’une justice d’exception aisément manœuvrée par des impératifs de communication politique. L’antiterrorisme, qui traversait une période creuse, a imposé ses procédures spéciales à une « mouvance » désignée comme dangereuse et prioritaire par l’exécutif. Aujourd’hui, le dossier semble en décalage complet avec les attentats qui ont frappé la France en 2015 et 2016. Une bande de contestataires sans armes, sans explosifs et sans intentions meurtrières : pourquoi diable des juges de la galerie Saint-Éloi en ont-ils été chargés ?
En août 2015, lorsqu’ils ont ordonné qu’un procès se tienne, les juges d’instruction Jeanne Duyé et Christophe Teissier ont finalement retiré l’étiquette « terroriste » collée jusque-là sur le dossier. Mais d’autres y tenaient. Le premier juge à avoir instruit l’affaire s’accrochait à cette qualification des faits ; ses successeurs ont désavoué son analyse. Le parquet, ensuite, a fait appel pour que la circonstance aggravante de terrorisme soit conservée – il a essuyé un échec – puis s’est pourvu en cassation pour les mêmes raisons. Leurs arguments démontrent comment des actes déconnectés du « terrorisme » tel qu’on l’entend au quotidien peuvent se retrouver, pendant des années, pris dans les filets de la justice antiterroriste.

Dans le débat public, l’affaire de Tarnac s’est généralement résumée à deux questions.