Il est rare que le cas d’un homme, à lui seul, illustre aussi bien les rapports de forces au sein de l’État : Sofiyan I. est de ceux-là. Au nom de la lutte contre le terrorisme, le pouvoir exécutif et le pouvoir judiciaire se disputent le privilège de le priver de liberté. Fin septembre 2015, ce trentenaire condamné dans une affaire de terrorisme islamiste – liée à des départs pour le Mali – commence à purger sa peine sous bracelet électronique. Mais un mois et demi plus tard, alors que les attentats du 13 Novembre viennent d’avoir lieu, le ministère de l’Intérieur l’assigne à résidence. Les deux régimes s’avèrent incompatibles. La justice décide donc de suspendre l’exécution de sa peine, jusqu’à la levée (future) de son assignation.
Cela fait quinze mois que Sofiyan I. doit pointer au commissariat trois fois par jour et rester chez lui de 21h30 à 7h30, sans sortir de la commune où il habite. Il fait partie des rares personnes assignées sans interruption depuis le début de l’état d’urgence. À ce titre, il a déposé une question prioritaire de constitutionnalité visant à faire reconnaître cette durée comme excessive. Son avocat, Bruno Vinay, soutient que la prolongation de son assignation au-delà d’un an ne se fonde sur « aucun élément nouveau » et change la nature même de la mesure : de « restrictive » de liberté, elle en deviendrait « privative ». Le Conseil constitutionnel doit se prononcer dans les prochaines semaines.
![Sofiyan I. habite à Toulouse](/ressources/image/ep23-assigne-toulouse-img-assigne-toulouse-1.jpg)
En juin dernier, Sofiyan I.