Le 3 octobre 1980, une bombe cachée dans la sacoche d’une moto explose devant la synagogue de la rue Copernic (Paris XVIe), faisant quatre morts et une quarantaine de blessés. Pour aboutir plus vite et frapper plus fort
, le ministre de la Justice de l’époque, Alain Peyrefitte, confie l’enquête à la Cour de sûreté de l’État, alors chargée des affaires de terrorisme. Lorsqu’elle est supprimée l’année suivante, la plupart des 135 affaires dites politiques ou terroristes sont “réglées”
, explique l’universitaire Vanessa Codaccioni. Plusieurs dizaines d’inculpés pour terrorisme bénéficient d’un non-lieu (principalement des indépendantistes corses et bretons), certaines affaires sont transférées aux tribunaux militaires (en cas d’espionnage par exemple) ou renvoyées à la justice de droit commun.
Le dossier de la rue Copernic, considéré comme très grave
, échoit au parquet de Paris. Trente-six ans plus tard, un juge d’instruction antiterroriste essaie toujours de faire la lumière sur cet attentat. La plus vieille affaire encore en cours à la galerie Saint-Éloi (lire l’épisode 1, « La galerie des neuf juges ») n’a pas fini de rebondir.
Il a fallu près de vingt ans pour que la justice française identifie un suspect. C’est en 1999 que le nom d’Hassan Diab est évoqué pour la première fois, dans une note de la DST (la Direction de surveillance du territoire, ancêtre de la DGSI). Au fil de l’enquête, un faisceau d’indices – un portrait-robot d’époque, des expertises graphologiques, l’analyse de son passeport retrouvé à Rome, des témoignages – converge vers lui. Il est soupçonné d’avoir directement participé à l’attentat, sous la fausse identité d’Alexander Panadriyu. Cet alias, assorti d’un faux passeport chypriote, a servi à acheter la moto de la rue Copernic et à louer une chambre d’hôtel dans le VIIIe arrondissement.
Hassan Diab est arrêté au Canada en 2008. Jusque-là, ce Libano-Canadien enseignait la sociologie à l’université d’Ottawa. Il a fallu six ans au juge Marc Trévidic pour obtenir son extradition. En novembre 2014, Hassan Diab, 63 ans, est mis en examen pour assassinats en relation avec une entreprise terroriste et écroué à Fleury-Mérogis. Soutenu par ses collègues, Hassan Diab a toujours clamé son innocence, épuisant les recours. Il se dit victime d’un double coup du sort : une homonymie (son nom est très courant au Liban) et un vol de passeport qui se retourne contre lui.